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Document 52016AB0026

Avis de la Banque centrale européenne du 20 avril 2016 sur une proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) n° 806/2014 afin d’établir un système européen d’assurance des dépôts (CON/2016/26)

JO C 252 du 12.7.2016, p. 1–7 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

12.7.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 252/1


AVIS DE LA BANQUE CENTRALE EUROPÉENNE

du 20 avril 2016

sur une proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) no 806/2014 afin d’établir un système européen d’assurance des dépôts

(CON/2016/26)

(2016/C 252/01)

Introduction et fondement juridique

Le 20 janvier 2016, la Banque centrale européenne (BCE) a reçu une demande de consultation de la part du Conseil de l’Union européenne portant sur une proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) no 806/2014 visant à établir un système européen d’assurance des dépôts (1) (ci-après le «règlement proposé»). Le 1er février 2016, la BCE a reçu une demande de consultation de la part du Parlement européen portant sur le règlement proposé.

La BCE a compétence pour émettre un avis en vertu de l’article 127, paragraphe 4, et de l’article 282, paragraphe 5, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) étant donné que le règlement proposé contient des dispositions ayant une incidence sur la contribution du Système européen de banques centrales à la bonne conduite des politiques en ce qui concerne la stabilité du système financier, telle que visée à l’article 127, paragraphe 5, du TFUE, et les missions confiées à la BCE ayant trait aux politiques en matière de contrôle prudentiel des établissements de crédit, telles que visées à l’article 127, paragraphe 6, du TFUE. Conformément à l’article 17.5, première phase, du règlement intérieur de la Banque centrale européenne, le présent avis a été adopté par le conseil des gouverneurs.

1.   Observations générales

1.1.

Un système européen d’assurance des dépôts (SEAD) constitue le troisième pilier nécessaire à l’achèvement de l’union bancaire après la mise en place du mécanisme de surveillance unique (MSU) et du mécanisme de résolution unique (MRU). Étant donné la nécessité de mettre en adéquation les responsabilités et le contrôle, la création d’un filet de sécurité commun pour les déposants au niveau européen représente le complément logique de l’objectif visant à porter à ce même niveau la responsabilité de la surveillance et de la résolution bancaires. Du fait que le MSU et le MRU sont pleinement opérationnels, les autorités nationales, dans une large mesure, n’ont plus le contrôle des principaux éléments servant à déterminer si un système de garantie des dépôts (SGD) national doit effectuer des remboursements aux déposants assurés ou contribuer au financement de la résolution. Par conséquent, il convient d’assumer aussi au niveau européen et de porter au niveau du SEAD la responsabilité visant à garantir l’existence de moyens financiers suffisants pour soutenir la confiance de l’ensemble des déposants et préserver ainsi la stabilité financière. Le règlement proposé reprend les recommandations du rapport des cinq présidents (2), qui préconisait le lancement d’un SEAD. Comme précisé dans le rapport, un système bancaire ne peut être véritablement uniforme que si le niveau de confiance dans la sécurité des dépôts bancaires est uniformément élevé dans l’ensemble des États membres. Un SEAD présenterait également des avantages liés à la diversification des risques et serait davantage susceptible de résister aux chocs, du fait d’une répartition plus large des risques sur un ensemble plus étendu d’établissements financiers et d’une probabilité moins élevée de voir les différents cas de remboursement dépasser les capacités du système.

1.2.

La BCE partage pleinement l’approche de la Commission selon laquelle un système unique de protection des dépôts constitue le troisième pilier indispensable à la constitution de l’union bancaire, qui est nécessaire pour renforcer la protection des déposants et soutenir la stabilité financière et, ainsi, contribuer à la consolidation de l’Union économique et monétaire (UEM) (3).

1.3.

La BCE salue en outre la mise en place, par le règlement proposé, d’un processus progressif visant à renforcer l’assurance mutuelle des SGD participants, afin d’aboutir à un système uniforme de garantie des dépôts desserrant le lien entre les banques et les émetteurs souverains de leur pays.

1.4.

D’une manière générale, la BCE se félicite que le règlement proposé permette de définir une feuille de route claire ainsi qu’un calendrier avec des étapes précises et limitées conduisant à l’adoption d’un SEAD à part entière. Les diverses phases de réassurance et de coassurance doivent à ce titre être envisagées comme des transitions vers la phase d’assurance intégrale, dont le démarrage est prévu pour 2024. Cette approche échelonnée prend en compte la nécessité de continuer à progresser dans d’autres secteurs de l’union bancaire et de l’UEM dans son ensemble. Elle vise par ailleurs à garantir un délai suffisant pour réunir des contributions ex ante dans l’ensemble de l’union bancaire, préalablement au démarrage de la phase d’assurance intégrale. Enfin, le traitement équitable des établissements de crédit affiliés aux SGD participants sera assuré par une prise en compte des risques propres à ces établissements, par rapport à tous les autres établissements de crédit de l’union bancaire, lors de la détermination de leurs contributions respectives. Afin d’étayer encore la crédibilité du SEAD et de rompre réellement le lien entre les banques et les émetteurs souverains au niveau national, il est recommandé de mettre en place, pour le SEAD, un dispositif de soutien commun public, neutre d’un point de vue budgétaire, au plus tard au début de la phase d’assurance intégrale.

1.5.

Toutefois, le bon fonctionnement de l’union bancaire nécessite des mesures supplémentaires en plus de la création du SEAD. À cette fin, la communication de la Commission intitulée «Vers l’achèvement de l’union bancaire» (4) énonce un certain nombre de mesures visant à réduire encore les risques dans le secteur bancaire et à garantir des conditions de concurrence équitables. Dans ce contexte, la BCE souligne l’importance de mettre en œuvre intégralement et en temps voulu la directive 2014/49/UE du Parlement européen et du Conseil (5), ce qui est une condition préalable indispensable à l’établissement du SEAD, et exhorte par conséquent les États membres concernés à respecter cette obligation dans les meilleurs délais (6). La BCE accueille favorablement et soutient pleinement toutes les autres mesures de réduction des risques préconisées par la Commission dans sa communication. Il convient de progresser sur ces autres mesures parallèlement à la mise en place du SEAD, non seulement pour garantir des conditions de concurrence équitables, mais aussi pour promouvoir l’intégration financière. Cependant, une solution faisant dépendre le passage d’une phase du SEAD à la suivante des progrès réalisés en matière de réduction des risques pourrait engendrer des retards. En cas de soutien à une telle introduction progressive et conditionnelle du SEAD, toute étape clé en matière de réduction des risques devrait être préalablement définie avec précision, objectivement vérifiable, concrètement réalisable et juridiquement liée aux transitions entre les phases du SEAD proposé. Pour éviter que la mise en place du SEAD ne soit indéfiniment repoussée, la liste des étapes clés devrait comprendre les éléments indispensables à la consolidation de l’union bancaire. Dans un premier temps, cette liste devrait se limiter aux questions ayant un lien clair et concret avec le SEAD et ne pas se référer aux discussions en cours pour lesquelles aucun calendrier n’est défini.

1.6.

Enfin, la BCE considère qu’une analyse d’impact peut se justifier, si elle porte sur les éléments les plus importants de la proposition, eu égard au règlement proposé et à son interaction avec la législation de l’Union, notamment la directive 2014/49/UE et la directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil (7), et ainsi qu’au rôle du Conseil de résolution unique (ci-après le «CRU»), en comparaison du rôle actuel des organes décisionnaires responsables des SGD nationaux.

2.   Observations spécifiques

2.1.   Objectif du règlement proposé

La BCE se félicite que le règlement proposé vise la cohérence avec la directive 2014/49/UE, en complétant ses règles et principes (8). La principale mission confiée à un SGD par la directive 2014/49/UE est la suivante: «protéger les déposants contre les conséquences de l’insolvabilité d’un établissement de crédit» (9). Le règlement proposé régit la relation entre le SEAD, le fonds d’assurance des dépôts (FAD) et les SGD, selon laquelle les systèmes nationaux restent pleinement responsables de l’indemnisation des déposants. Dans ce contexte, la BCE estime nécessaire de clarifier de façon expresse, dans le libellé du règlement proposé, le fait que le SEAD a également pour objectif d’assurer le plus haut niveau possible de protection des déposants dans l’ensemble des États membres de l’union bancaire.

2.2.   Champ d’application du SEAD

La BCE se félicite également que le règlement proposé recommande qu’il s’applique à tous les SGD officiellement reconnus dans les États membres participant à l’union bancaire, conformément à la directive 2014/49/UE (10), à savoir aux SGD institués par la loi, aux SGD contractuels et aux systèmes de protection institutionnels, ainsi qu’à tous les établissements de crédit affiliés à ces systèmes. Toutefois, tous les établissements de crédit ayant accès aux ressources du SEAD doivent faire l’objet d’une réglementation et d’une surveillance prudentielle sur la base du règlement (UE) no 575/2013 du Parlement européen et du Conseil (11) et de la directive 2013/36/UE du Parlement européen et du Conseil (12). Cette approche est totalement conforme à la recommandation du rapport des cinq présidents, selon laquelle le champ d’application du SEAD devrait coïncider avec celui du MSU et les redevances déterminées sur la base d’une analyse des risques devraient être versées par toutes les banques participantes des États membres. En effet, seul un régime de protection des dépôts complet et uniforme aboutira au même niveau de confiance des déposants dans l’ensemble de l’union bancaire, empêchant ainsi la fragmentation du marché et les distorsions de concurrence.

2.3.   Gouvernance du SEAD

La BCE approuve l’administration future du SEAD par le CRU. Il est important que le SEAD soit administré par un organe de l’Union indépendant, protégé de toute influence politique et garantissant à tous les SGD l’égalité d’accès au FAD. Le CRU devrait bénéficier de synergies résultant de son administration simultanée du fonds de résolution et du fonds d’assurance des dépôts, notamment du fait qu’il pourra s’appuyer sur son expertise accumulée lors de l’exercice de ses missions de résolution pour l’administration du fonds de résolution unique (FRU). Des gains d’efficacité pourraient être obtenus étant donné que l’administration et les investissements des deux fonds requièrent un savoir-faire et une expertise comparables. Cependant, il se peut que la bonne exécution de ces nouvelles missions nécessite l’octroi au CRU de ressources supplémentaires (voir point 2.9). Les ressources du FRU et du FAD devraient être clairement affectées à leurs objectifs respectifs, précisément dans le but d’éviter le risque que les ressources affectées à la protection des dépôts soient mélangées et potentiellement «consommées» à des fins de résolution.

La BCE approuve les dispositifs proposés selon lesquels elle a le droit de désigner un représentant permanent pouvant assister aux réunions de toutes les sessions du CRU, notamment à la session plénière du SEAD et à la session plénière conjointe.

Enfin, la BCE se félicite que seules les autorités de résolution et les autorités désignées nationales soient membres des organes décisionnaires du SEAD. Aucune entité privée chargée de l’administration d’un SGD national ne participerait ainsi directement à une session plénière du SEAD. La BCE est favorable à cette restriction et rappelle que selon la définition de l’article 2, paragraphe 1, point 18, de la directive 2014/49/UE, seules les autorités (publiques) désignées sont habilitées à participer aux «collèges de résolution». En effet, comme les entités privées administrant les SGD sont détenues, dans certains États membres, par des associations bancaires, le fait de leur donner accès à des informations confidentielles sur des banques concurrentes pourrait soulever de graves problèmes en termes de secret des affaires.

2.4.   Réduction des coûts de liquidation et contrôle du recours au SEAD

Concernant la procédure de résolution, lorsque la directive 2014/59/UE recommande expressément que les autorités de résolution s’efforcent de réduire au minimum les coûts de résolution et d’éviter la destruction de valeur, les autorités chargées de la liquidation devraient également tendre vers l’objectif général de réduction des coûts de liquidation, garantissant ainsi que les pertes afférentes aux dépôts garantis et, par conséquent aux SGD, restent limitées. Dans ce but, les autorités chargées de la liquidation devraient être autorisées à dissocier le portefeuille de dépôts garantis ainsi que certains autres actifs de l’établissement de crédit défaillant et à les céder à un acquéreur du secteur privé. Ce type d’opération d’acquisition et de reprise peut, dans de nombreux cas, se révéler moins onéreux pour un SGD que le simple remboursement des dépôts garantis lors de la liquidation. De la même façon, il convient de préciser, dans le texte du règlement proposé, si les ressources financières du SEAD peuvent être utilisées pour l’application des autres mesures décrites à l’article 11, paragraphe 6, de la directive 2014/49/UE. La manière dont le processus de liquidation est mené étant essentielle pour la sauvegarde des fonds du SGD et, par conséquent, de ceux du SEAD, il est important que le CRU ait la faculté d’exercer un certain contrôle sur le processus national de liquidation. Ainsi, de façon similaire au règlement (UE) no 806/2014, qui prévoit que le CRU prenne le relais des autorités nationales, pour la résolution, en cas de nécessité d’utiliser des fonds du FRU, le CRU devrait avoir voix au chapitre lors de la procédure de liquidation en cas de besoin probable des ressources du SEAD. Une cohérence parfaite entre le contrôle de la procédure de liquidation et la responsabilité relative à la protection des dépôts serait ainsi assurée.

2.5.   Contributions pondérées en fonction des risques

La BCE soutient résolument le fait que le règlement proposé introduise une méthode de calcul des contributions pondérées en fonction des risques, dans l’ensemble de l’union bancaire, à partir de la phase de coassurance, et qu’il confie au CRU le rôle de déterminer le niveau de contribution de chaque établissement de crédit par rapport à tous les autres établissements de crédit participants. Cela est crucial afin de garantir une répartition équitable des contributions et un financement solide du SEAD. Le niveau de risque est déterminé suivant une méthode fondée sur les critères (13) prévus à l’article 74 quater du règlement proposé. Cette détermination doit prendre en compte le risque propre à l’établissement, par rapport à tous les autres établissements de crédit de l’union bancaire. La comparaison de ces risques dans l’ensemble de l’union bancaire et l’ajustement des contributions respectives sur cette base contribuent à créer les incitations adaptées aux décisions commerciales et à limiter les risques de comportements opportunistes ainsi que l’aléa moral. Cet aspect est important pour apaiser les craintes selon lesquelles certains secteurs bancaires pourraient être «financés» par d’autres secteurs bancaires.

Une autre question importante consistera à se demander si et dans quelle mesure il convient que l’approche fondée sur les risques, utilisée pour déterminer le niveau des contributions, reflète également la probabilité de recours à la garantie des dépôts pour un établissement de crédit, et plus particulièrement, la probabilité qu’il faille le mettre en liquidation plutôt que le soumettre à une procédure de résolution.

De plus, pour des raisons de sécurité juridique, le règlement proposé doit se pencher sur la manière dont seront utilisées les contributions, qui, dans certains États membres, sont prélevées à un niveau supérieur à l’exigence minimum de 0,8 % des dépôts garantis.

2.6.   Rôle de la BCE dans la détermination du montant total des contributions ex ante de chaque SGD participant

La BCE accueille favorablement la disposition du règlement proposé selon laquelle, chaque année pendant la durée de la période de réassurance et de coassurance, le CRU consultera la BCE et l’autorité nationale compétente préalablement à la détermination, pour chaque SGD, du montant total des contributions ex ante qu’il est en droit d’exiger des établissements de crédit qui lui sont affiliés. Ces consultations régulières reflètent l’expertise des autorités de surveillance en matière d’évaluation du niveau de risque des établissements et permettent à la BCE et aux autorités nationales compétentes de s’assurer que la procédure de calcul et de collecte des contributions ne met pas en péril la solidité des établissements de crédit contributeurs.

2.7.   Utilisation des ressources

La BCE est favorable à la disposition du règlement proposé requérant d’utiliser les ressources, non seulement pour les remboursements, mais aussi pour les cas de résolution survenant lors d’une des trois phases du SEAD. Cette disposition est importante pour faciliter une résolution, qui peut se révéler d’utilité publique pour de nombreuses banques en situation de défaillance avérée ou prévisible et qui est par conséquent la solution privilégiée par rapport à l’insolvabilité. Elle est également conforme aux exigences de la directive 2014/49/EU et du règlement (UE) no 806/2014, selon lesquelles les SGD sont redevables à concurrence du niveau des dépôts garantis, dans la mesure où les déposants continuent d’avoir accès à leurs dépôts et où la participation au financement de la résolution n’excède pas les pertes que le SGD aurait subies en cas d’insolvabilité.

Cependant, le règlement proposé devrait expressément examiner l’éventualité d’une garantie, par le SEAD, des dépôts dont le solde excède 100 000 EUR, qui bénéficient d’une protection temporaire de trois à douze mois conformément à la législation de l’État membre concerné, comme le permet l’article 6 de la directive 2014/49/UE.

2.8.   Obligation du SEAD vis-à-vis des SGD lors des phases d’assurance partielle et d’assurance intégrale

La mise en place du SEAD facilitera l’accès par les SGD à des ressources financières supplémentaires, dans un premier temps par le biais de la réassurance et de la coassurance, et ces ressources seront graduellement constituées dans le FAD à cet effet. En 2024 au plus tard, toutes les contributions prélevées auprès des établissements de crédit affiliés aux SGD seront directement transférées au FAD dans le cadre du SEAD. Cependant, conformément à la directive 2014/49/UE, ce sont les systèmes nationaux, et non le SEAD ou le FAD, qui restent pleinement responsables pour les demandes d’indemnisation des déposants. Par conséquent, lors de la phase d’assurance intégrale, le règlement proposé devrait clairement prévoir l’obligation juridique, pour le SEAD ou le FAD, de satisfaire à tous les besoins en ressources liés aux demandes des déposants consécutives à un événement notifié par un SGD national conformément à l’article 41 nonies, point 2. La BCE comprend que cette obligation du SEAD est prévue par l’article 41 nonies, paragraphe 1, qui précise que «les SGD participants sont intégralement assurés par le SEAD». Cependant, il convient de clarifier s’il existe une obligation juridique précise à l’article 41 quaterdecies, paragraphe 2, pour garantir que les remboursements au prorata envisagés lors de la survenue simultanée de plusieurs événements de remboursement ne concernent que la distribution des moyens financiers immédiatement disponibles, c’est-à-dire que le SEAD n’est pas dispensé de son obligation vis-à-vis des SGD, qui lui impose la couverture complète de tous les frais de ces derniers, à l’issue de la collecte des contributions ex post et/ou d’un recours à des moyens de financement alternatifs. Plus important encore, la même obligation juridique, bien que limitée à la partie spécifique coassurée, doit également s’appliquer aux obligations du SEAD vis-à-vis des SGD lors de la phase de coassurance. Cela confirme également la nécessité d’un dispositif de soutien public, neutre sur le plan budgétaire, pour le SEAD. Enfin, il convient de réduire le délai nécessaire au CRU pour prendre une décision sur les moyens financiers disponibles conformément à l’article 41 quaterdecies, paragraphe 2, étant donné que les SGD sont tenus d’indemniser les déposants dans un délai de sept jours ouvrables (14).

2.9.   Exclusion de la couverture par le SEAD

L’article 41 decies prévoit une procédure d’exclusion d’un SGD participant de la couverture du SEAD. Dans le cadre de cette procédure, la Commission, de sa propre initiative ou à la demande du CRU ou d’un État membre participant, peut déterminer: a) qu’un SGD ne respecte pas ses obligations au titre du règlement proposé ou des articles 4, 6, 7 ou 10 de la directive 2014/49/UE; ou b) qu’un SGD, l’autorité administrative concernée au sens de l’article 3 de la directive 2014/49/UE, ou toute autre autorité pertinente de l’État membre a, dans le cadre d’une demande de couverture par le SEAD, agi d’une manière qui va à l’encontre du principe de coopération loyale visé à l’article 4, paragraphe 3, du traité sur l’Union européenne (TUE).

La BCE se félicite que le règlement proposé comporte des garde-fous, visant à garantir que tous les SGD s’acquittent de leurs obligations respectives définies par le nouveau cadre conformément à la transposition nationale de la directive 2014/49/UE. Cela est important afin d’éviter tout risque de comportement opportuniste et de réduire l’aléa moral. Cependant, l’exclusion d’un SGD national ne peut être envisagée, en raison de l’ampleur d’une telle sanction et de ses conséquences finales pour les déposants, que si elle est proportionnée à la violation subie et qu’elle est infligée après le non-respect, par le SGD en question, des mesures d’exécution temporaires dans des délais préétablis et suivant les procédures à mettre en place conformément au règlement proposé. Dans le but de renforcer la sécurité juridique, les violations sanctionnées par une exclusion devraient être définies de façon plus précise. D’autres sanctions, telles que le paiement de pénalités, pourraient être envisagées en cas de violation moins importante. De plus, lorsqu’une exclusion est décidée, il convient de mettre en place un mécanisme adéquat pour garantir que l’objectif premier, consistant à assurer la meilleure protection de tous les dépôts garantis, est rempli à tout moment. Cela est particulièrement important à partir de la phase d’assurance intégrale, lorsque toutes les contributions collectées auprès des établissements de crédit participants seront transférées directement dans le SEAD, afin de garantir que les déposants ne se trouvent pas dans une situation plus défavorable, en termes de protection des dépôts, que la situation qui serait la leur si leur SGD ne faisait pas partie du SEAD et que toutes les contributions étaient collectées au niveau national.

Dans ce contexte, plusieurs solutions peuvent être envisagées. À titre d’exemple, les contributions des SGD exclus pourraient être conservées au sein du FAD et les dépôts détenus à la date où le SGD est exclu pourraient continuer à être couverts par le SEAD, en garantissant aux déposants la possibilité de détenir une créance directe sur le SEAD. Une autre solution consisterait à prévoir, dans le règlement proposé, une méthode et une procédure par lesquelles les fonds collectés auprès des établissements de crédit affiliés au SGD exclu seraient remboursés à ce SGD dès son exclusion. Dans l’un ou l’autre de ces cas de figure, les montants à rembourser ou disponibles pour honorer les créances directes devraient être plafonnés afin de rester dans la logique de l’objectif de la clause d’exclusion. Le règlement proposé devrait donner des indications claires sur la procédure de remboursement, notamment les délais et la méthode de calcul des montants à rembourser. Cette méthode pourrait par exemple s’inspirer de celle appliquée au reversement des contributions aux SGD conformément au règlement proposé, en cas de résiliation des accords de coopération rapprochée entre la BCE et les autorités compétentes des États membres n’appartenant pas à la zone euro dans le cadre du MSU (15). De la même façon, si l’option de remboursement n’est pas choisie, l’autorité compétente devrait avoir le droit de demander des ressources au FAD afin de contribuer à une mesure de résolution, conformément à la directive 2014/59/UE (16), lors de la prise d’une décision selon laquelle un établissement de crédit est en situation de défaillance avérée ou prévisible.

Les considérants (17) du règlement proposé laissent entendre que le principe de coopération loyale, tel qu’énoncé à l’article 4, paragraphe 3, du TUE, s’étend à l’ensemble des entités, organes et autorités concernés par l’application du règlement proposé. Néanmoins, pour des raisons de sécurité juridique, il convient peut-être de mentionner expressément, à l’article 41 decies, que ce principe s’applique également à la Commission et au CRU. De plus, le règlement proposé devrait être formulé de façon à indiquer à quel moment les conditions auxquelles ce principe s’applique seraient considérées comme n’ayant pas été respectées, afin d’obtenir des garanties procédurales adéquates, la prévisibilité des conséquences et la prévention des risques inutiles pesant sur la stabilité financière.

Enfin, l’article 41 decies bénéficierait également de l’ajout d’une procédure et d’un calendrier à respecter lors de la prise des décisions d’exclusion. À cet égard, la procédure prévue à l’article 258 du TFUE pourrait servir d’exemple (18). De plus, il pourrait être nécessaire de clarifier le lien entre la procédure d’exclusion prévue à l’article 41 decies et la procédure en manquement prévue par l’article 258 du TFUE. À cet égard, il convient de noter que l’exclusion d’un SGD sans reversement des contributions apportées par les établissements affiliés audit SGD serait assimilée à une violation automatique, par le SGD concerné, de l’article 10, paragraphe 2, de la directive 2014/49/UE (19). En effet, conformément à l’article 74 quater, paragraphe 4 du règlement proposé, les contributions versées au SEAD par les établissements de crédit affiliés à un SGD participant sont prises en compte aux fins du niveau cible minimum que ce SGD participant est tenu d’atteindre en vertu la directive 2014/49/UE. De plus, ce ne sont pas les SGD eux-mêmes qui sont tenus de respecter certaines conditions des articles 4, 6, 7 et 10 de la directive 2014/49/UE, mais les États membres ou d’autres entités telles que des établissements de crédit affiliés.

2.10.   Recouvrement des ressources du FAD

Les procédures permettant au FAD de recouvrer les ressources fournies à un SGD dans le cas d’un événement de remboursement dépendent surtout de la progression des efforts de recouvrement déployés dans le cadre des procédures nationales d’insolvabilité. La durée desdites procédures varie sensiblement entre les États membres et peut parfois être longue. Il serait souhaitable d’apporter des précisions supplémentaires à l’article 41 octodecies afin que le CRU soit en mesure d’exercer certains droits concernant les procédures nationales d’insolvabilité et que son statut juridique soit reconnu par les différentes juridictions. L’exercice effectif de ces droits peut également nécessiter l’octroi de ressources financières considérables au CRU.

2.11.   Dispositifs de soutien

Le règlement proposé ne prévoit pas de dispositif de soutien public européen, neutre d’un point de vue budgétaire, pour le SEAD, dans l’éventualité où un ou plusieurs événements de remboursement viendraient à dépasser les ressources financières disponibles du SEAD et où les contributions ex post ou les moyens de financement alternatifs ne pourraient être utilisés assez rapidement pour garantir, en temps utile, le remboursement des déposants ou l’intervention du SEAD en cas de résolution. Cela signifie que toute obligation de paiement vis-à-vis des déposants dépassant les ressources fournies par le SEAD revient en principe au SGD concerné en vertu de l’article 10, paragraphe 9, de la directive 2014/49/UE, qui exige que les États membres s’assurent que les SGD soient dotés d’autres mécanismes de financement appropriés leur permettant, le cas échéant, d’obtenir des fonds à court terme afin d’honorer leurs engagements. Par conséquent, l’efficacité du système dans son ensemble repose, en fin de compte, sur la crédibilité des dispositifs de soutien nationaux.

La BCE estime que la mise en place pour le SEAD, au plus tard à la phase d’assurance intégrale, d’un dispositif de soutien commun public, neutre du point de vue budgétaire, est nécessaire pour assurer un niveau uniformément élevé de confiance dans la protection des dépôts en toutes circonstances et desserrer efficacement le lien entre les banques et les émetteurs souverains au niveau national. En fin de compte, le fait de se reposer sur des dispositifs de soutien nationaux est en contradiction avec l’objectif même du règlement proposé, c’est-à-dire le renforcement de l’union bancaire par l’affaiblissement des liens entre les banques et les émetteurs souverains dans les différents États membres (20). La mise en place du SEAD renforce considérablement l’union bancaire en offrant un niveau bien plus élevé de protection contre les chocs locaux de grande ampleur, étant donné que les SGD ont accès aux ressources communes du SEAD. Cependant, en l’absence d’un dispositif de soutien commun, le SEAD ne serait pas en mesure d’éliminer un facteur susceptible de nuire à la confiance des déposants, lié à des craintes quant à la crédibilité de dispositifs de soutien purement nationaux. C’est pourquoi un dispositif de soutien commun public, neutre du point de vue budgétaire, constitue un élément important pour établir la crédibilité du SEAD et devrait être mis en place graduellement au rythme de la mutualisation progressive de la protection des dépôts. Non seulement un dispositif de soutien solide rassurerait les déposants des États membres dont la situation budgétaire est moins favorable, mais il entraînerait par ailleurs un renforcement du SEAD dans son ensemble. Un tel dispositif de soutien pour le FAD doit respecter le principe de la neutralité budgétaire, en veillant à ce que tous les fonds publics soient compensés par le prélèvement de contributions ex post sur le secteur financier. Le recours au mécanisme européen de stabilité pour la mise en place d’un dispositif de soutien commun public, neutre du point de vue budgétaire, semble constituer une solution envisageable.

2.12.   Accès automatique des États membres rejoignant le MSU

Le considérant 14 du règlement proposé semble envisager l’accès automatique au SEAD par tous les SGD officiellement reconnus dans un État membre rejoignant le MSU. S’il est vrai qu’il devrait être obligatoire de participer simultanément à tous les piliers de l’union bancaire, des mesures transitoires devraient être mises en place pour garantir l’intégration progressive et sans heurt de tout SGD rejoignant le MSU à une date ultérieure. Ceci évitera qu’une adhésion pèse de façon excessive sur les dispositifs de financement du SEAD. Par exemple, si un État membre a adhéré durant la dernière phase de coassurance ou la phase d’assurance intégrale, il pourrait être judicieux de prévoir que les fonds recueillis par les SGD (ou une fraction prédéfinie de ces fonds) soient transférés des SGD au SEAD, à compter de la date d’entrée en vigueur du règlement proposé, conformément au parcours de financement décrit à l’article 41 undecies.

2.13.   Échange d’informations

Le règlement proposé reconnaît l’importance d’un échange d’informations efficient entre les autorités participant au bon fonctionnement du SEAD, c’est-à-dire le CRU, les autorités désignées, les autorités compétentes, dont la BCE, et les autorités de résolution, du fait qu’il préconise, si nécessaire la conclusion d’un protocole d’accord (21). Eu égard à l’importance de cette question et afin d’éviter de potentiels freins à cet échange d’informations, une modification de l’article 34 du règlement (UE) no 806/2014 apparaît nécessaire pour inclure expressément les SGD et les autorités désignées dans les organes et autorités habilités à échanger des informations et à conclure des protocoles d’accord conformément audit article. Cette modification peut être réalisée en ajoutant une nouvelle disposition au règlement proposé.

2.14.   Observations techniques et propositions de rédaction

Lorsque la BCE recommande de modifier le règlement proposé, des suggestions de rédaction particulières, accompagnées d’une explication, figurent dans un document de travail technique séparé. Ce document inclut également le texte proposé par la BCE pour la modification de la directive 2014/49/UE. Le document de travail technique est disponible en anglais sur le site internet de la BCE.

Fait à Francfort-sur-le-Main, le 20 avril 2016.

Le président de la BCE

Mario DRAGHI


(1)  COM(2015) 586 final.

(2)  Le rapport des cinq présidents du 22 juin 2015, «Compléter l’Union économique et monétaire européenne», est disponible sur le site internet de la Commission à l’adresse suivante: www.ec.europa.eu.

(3)  Voir le rapport 2016 de la BCE sur l’intégration financière en Europe, le rapport des cinq présidents du 22 juin 2015, «Compléter l’Union économique et monétaire européenne», disponible sur le site internet de la Commission à l’adresse suivante: www.ec.europa.eu, la conférence Marjolin, donnée par Mario Draghi, président de la BCE, lors du colloque de la Société universitaire européenne de recherches financières (SUERF) organisé par la Deutsche Bundesbank le 4 février 2016 à Francfort et l’allocution de Mario Draghi, président de la BCE, lors du forum du 4 novembre 2015 sur la supervision bancaire. Ces deux derniers textes sont disponibles sur le site internet de la BCE à l’adresse suivante: www.ecb.europa.eu.

(4)  COM(2015) 587 final.

(5)  Directive 2014/49/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relative aux systèmes de garantie des dépôts (JO L 173 du 12.6.2014, p. 149).

(6)  Les États membres de la zone euro qui n’avaient pas encore procédé à la transposition étaient tenus d’achever celle-ci d’ici la fin du premier trimestre 2016.

(7)  Directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d’investissement et modifiant la directive 82/891/CEE du Conseil ainsi que les directives du Parlement européen et du Conseil 2001/24/CE, 2002/47/CE, 2004/25/CE, 2005/56/CE, 2007/36/CE, 2011/35/UE, 2012/30/UE et 2013/36/UE et les règlements du Parlement européen et du Conseil (UE) no 1093/2010 et (UE) no 648/2012 (JO L 173 du 12.6.2014, p. 190).

(8)  Voir considérant 15 du règlement proposé.

(9)  Voir considérant 14 de la directive 2014/49/UE.

(10)  Voir article 1er, paragraphe 3, du règlement proposé modifiant l’article 2 du règlement (UE) no 806/2014 du Parlement européen et du Conseil du 15 juillet 2014 établissant des règles et une procédure uniformes pour la résolution des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement dans le cadre d’un mécanisme de résolution unique et d’un Fonds de résolution bancaire unique, et modifiant le règlement (UE) no 1093/2010 (JO L 225 du 30.7.2014, p. 1); voir également article 1er, paragraphe 2, points a), b) et c), et article 2, paragraphe 1, de la directive 2014/49/UE.

(11)  Règlement (UE) no 575/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 concernant les exigences prudentielles applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d’investissement et modifiant le règlement (UE) no 648/2012 (JO L 176 du 27.6.2013, p. 1).

(12)  Directive 2013/36/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 concernant l’accès à l’activité des établissements de crédit et la surveillance prudentielle des établissements de crédit et des entreprises d’investissement, modifiant la directive 2002/87/CE et abrogeant les directives 2006/48/CE et 2006/49/CE (JO L 176 du 27.6.2013, p. 338).

(13)  Ces critères sont: a) le niveau de capacité d’absorption des pertes de l’établissement; b) la capacité de l’établissement à respecter ses obligations à court et à moyen [lire: long] termes; c) la stabilité et la diversité des sources de financement de l’établissement et de ses actifs non grevés très liquides; d) la qualité des actifs de l’établissement; e) le modèle économique et la gestion de l’établissement; f) le degré auquel les actifs de l’établissement sont grevés.

(14)  Sous réserve des dispositions transitoires, qui expirent cependant au début de la phase d’assurance intégrale.

(15)  Voir article 1er, paragraphe 5, du règlement proposé, modifiant notamment l’article 4, paragraphe 3, du règlement (UE) no 806/2014.

(16)  Article 109 de la directive 2014/59/UE.

(17)  Voir notamment le considérant 40 du règlement proposé.

(18)  L’article 258 du TFUE prévoit une procédure que la Commission est tenue de respecter si elle considère qu’un État membre a manqué à une des obligations qui lui incombent en vertu des traités: elle est tenue d’émettre un avis motivé à ce sujet, après avoir mis l’État membre en cause en mesure de présenter ses observations. Si l’État membre en cause ne se conforme pas à cet avis dans le délai déterminé par la Commission, celle-ci peut saisir la Cour de justice de l’Union européenne.

(19)  Selon l’article 10, paragraphe 2, de la directive 2014/49/UE, les États membres veillent à ce que, au plus tard le 3 juillet 2024, les moyens financiers disponibles d’un SGD atteignent au moins un niveau cible de 0,8 % du montant des dépôts garantis de ses membres.

(20)  Voir considérant 17 du règlement proposé.

(21)  Voir considérant 39 du règlement proposé.


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