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1 Vue d’ensemble

La persistance de fortes incertitudes, géopolitiques, commerciales et économiques, devrait peser sur la croissance du PIB de la zone euro et freiner la reprise attendue. Or, la croissance économique a déjà été légèrement plus faible que prévu à la fin de 2024. Les incertitudes sont élevées tant dans la zone euro qu’en ce qui concerne les politiques commerciales. Même si le scénario de référence des projections ne tient compte que de l’incidence des nouveaux droits de douane sur les échanges commerciaux entre les États-Unis et la Chine, les effets négatifs de l’incertitude liée à l’hypothèse de nouvelles révisions des politiques commerciales mondiales, en particulier vis-à-vis de l’Union européenne (UE), devraient peser sur les exportations de la zone euro et l’investissement en son sein. Dans cette situation, mais aussi du fait des défis persistants en matière de compétitivité, les parts de marché à l’exportation de la zone euro devraient de nouveau reculer. En dépit de ces facteurs défavorables, les conditions d’un renforcement, sur l’horizon de projection, de la croissance du PIB de la zone euro demeurent réunies. La hausse des salaires réels et de l’emploi, dans le contexte d’un marché du travail robuste, malgré une accalmie, devrait soutenir une reprise de la croissance dont la consommation resterait un facteur essentiel. La demande intérieure devrait également bénéficier d’un assouplissement des conditions de financement, qui ressort des anticipations des marchés relatives à l’évolution future des taux d’intérêt. Le marché du travail devrait rester vigoureux et le taux de chômage s’établir à 6,3 % en moyenne en 2025, avant de diminuer légèrement pour revenir à 6,2 % en 2027. Même si des difficultés structurelles persistent, la productivité devrait se redresser sur l’horizon de projection alors que certains facteurs conjoncturels l’ayant récemment affaiblie commencent à se dissiper. Dans l’ensemble, la croissance annuelle moyenne du PIB en volume devrait s’établir à 0,9 % en 2025, avant de se renforcer et d’atteindre 1,2 % en 2026 et 1,3 % en 2027. Par rapport aux projections macroéconomiques de décembre 2024 établies par les services de l’Eurosystème, les perspectives de croissance du PIB ont été révisées à la baisse, de 0,2 point de pourcentage pour 2025 et 2026, mais restent inchangées pour 2027. La détérioration des perspectives est principalement due à des révisions à la baisse des exportations et, dans une moindre mesure, de l’investissement, reflétant une incidence plus forte de l’incertitude que prévu précédemment ainsi que l’anticipation d’une persistance probablement plus durable qu’attendu des défis en matière de compétitivité[1].

La hausse de l’IPCH total s’est accélérée au cours des derniers mois, mais devrait légèrement se modérer en 2025 puis ralentir et fluctuer autour de l’objectif d’inflation de 2,0 % de la BCE à partir du premier trimestre 2026. Au début de l’horizon de projection, des effets de base haussiers émanant de la composante énergie et la progression plus forte des prix des produits alimentaires devraient globalement compenser l’incidence baissière du ralentissement de l’inflation mesurée par l’IPCH hors énergie et produits alimentaires (IPCHX). L’augmentation des prix des matières premières énergétiques au tournant de l’année se répercutera sur le taux de variation annuel des prix de l’énergie en 2025. Même si les prix du pétrole et du gaz devraient diminuer conformément aux prix des contrats à terme, le renchérissement de l’énergie devrait se poursuivre sur l’ensemble de l’horizon de projection, quoiqu’à des taux inférieurs à la moyenne de long terme. En 2027, la hausse des prix de l’énergie devrait être alimentée par l’introduction de nouvelles mesures d’atténuation du changement climatique. L’augmentation des prix des produits alimentaires devrait s’accentuer jusque mi-2025, principalement sous l’effet des fortes hausses récentes des prix des matières premières alimentaires, avant de revenir à 2,2 % en moyenne en 2027. La hausse de l’IPCHX commencerait à se ralentir début 2025 avec la dissipation des effets des réévaluations décalées, l’atténuation des tensions sur les salaires et la poursuite de la transmission aux prix à la consommation du resserrement passé de la politique monétaire. Ce ralentissement serait principalement dû à une décélération des prix des services, dont la hausse a été relativement persistante jusqu’à présent. De manière générale, l’inflation mesurée par l’IPCHX devrait revenir de 2,2 % en 2025 à 1,9 % en 2027. Grâce à l’affaiblissement des tensions liées à la compensation de l’inflation, la progression des salaires resterait sur une trajectoire baissière par rapport aux niveaux actuels toujours élevés. Conjuguée à la reprise attendue de la croissance de la productivité, cette évolution devrait entraîner un ralentissement sensible de l’augmentation des coûts unitaires de main-d’œuvre. En conséquence, l’atténuation des tensions d’origine interne sur les prix devrait se prolonger et les marges bénéficiaires se redresser sur l’horizon de projection. Dans l’hypothèse de politiques de l’Union européenne en matière de droits de douane inchangées, les tensions sur les prix d’origine externe, reflétées par les prix à l’importation, resteraient quant à elles modérées. Par rapport aux projections de décembre 2024, les perspectives de hausse de l’IPCH total ont été révisées à la hausse de 0,2 point de pourcentage pour 2025 en raison d’hypothèses plus élevées relatives aux prix des matières premières énergétiques et de la dépréciation de l’euro, tandis qu’elles ont été légèrement révisées à la baisse pour 2027 sous l’effet de perspectives légèrement plus faibles pour la composante énergie à la fin de l’horizon de projection.

Les annonces concernant les politiques commerciales et budgétaires faites après la finalisation de ces projections ont accru l’incertitude entourant les perspectives de croissance économique et d’inflation dans la zone euro.

Tableau 1

Projections de croissance et d’inflation dans la zone euro

(variations annuelles en pourcentage, révisions en points de pourcentage)

 

 

Mars 2025

Révisions par rapport à décembre 2024

2024

2025

2026

2027

2024

2025

2026

2027

PIB en volume

0,8

0,9

1,2

1,3

0,1

-0,2

-0,2

0,0

IPCH

2,4

2,3

1,9

2,0

0,0

0,2

0,0

-0,1

IPCH hors énergie et produits alimentaires

2,8

2,2

2,0

1,9

-0,1

-0,1

0,1

0,0

Notes : Le PIB en volume est calculé à partir de moyennes annuelles de données corrigées des variations saisonnières et du nombre de jours ouvrés. Les données rétrospectives peuvent différer des dernières publications d’Eurostat en raison de dates de publication postérieures à la date d’arrêté des projections. Les révisions sont calculées à partir de chiffres arrondis. Les données (y compris trimestrielles) peuvent être téléchargées à partir de la base de données sur les projections macroéconomiques (Macroeconomic Projection Database) du site Internet de la BCE.

2 L’environnement international

La dynamique de la croissance mondiale s’est temporairement renforcée fin 2024, mais les évolutions récentes de la politique commerciale des États-Unis devraient produire des effets défavorables[2]. La croissance mondiale s’est redressée au quatrième trimestre 2024, globalement en ligne avec les projections de décembre 2024, la relance budgétaire ayant dopé l’activité en Chine et la vigueur des dépenses des ménages ayant soutenu la progression du PIB en volume aux États-Unis. Les données disponibles suggèrent un léger ralentissement au premier trimestre 2025, le secteur des services, qui a été le principal moteur de la croissance au second semestre 2024, montrant les premiers signes d’une décélération, tandis que l’activité dans le secteur manufacturier reste faible. En outre, l’incertitude relative à la politique commerciale a fortement augmenté depuis novembre 2024 dans un contexte d’annonces relatives aux droits de douane faites aux États-Unis et devrait freiner l’investissement mondial.

Tableau 2

L’environnement international

(variations annuelles en pourcentage, révisions en points de pourcentage)

 

Mars 2025

Révisions par rapport à décembre 2024

2024

2025

2026

2027

2024

2025

2026

2027

PIB en volume mondial (hors zone euro)

3,4

3,4

3,2

3,2

0,0

-0,1

-0,1

0,0

Commerce mondial (hors zone euro)1)

4,4

3,5

3,1

3,2

0,4

-0,1

-0,2

0,0

Demande extérieure adressée à la zone euro2)

3,4

3,2

3,1

3,1

0,3

-0,3

-0,2

-0,1

IPC mondial (hors zone euro)

4,2

3,3

2,7

2,5

0,0

0,1

-0,1

-0,1

Prix à l’exportation des concurrents en monnaie nationale3)

2,3

1,7

2,3

2,1

0,1

0,0

0,0

0,0

Note : Les révisions sont calculées à partir de chiffres arrondis.
1) Calculé comme la moyenne pondérée des importations.
2) Calculée comme la moyenne pondérée des importations des partenaires commerciaux de la zone euro.
3) Calculés comme la moyenne pondérée des déflateurs des exportations des partenaires commerciaux de la zone euro.

La croissance mondiale devrait rester modérée et ralentir légèrement sur l’horizon de projection. Le PIB mondial en volume devrait croître de 3,4 % en 2025, comme en 2024, et sa progression revenir à 3,2 % en 2026 et 2027 (tableau 2). Même s’il est encore difficile, sur la base des annonces faites, d’évaluer le calendrier et le degré de résolution de la politique commerciale américaine, les projections de mars 2025 intègrent les droits de douane supplémentaires décidés par les États-Unis sur les produits chinois et les représailles partielles de la part de la Chine (encadré 2). D’autres mesures américaines avaient déjà été intégrées dans les projections de décembre 2024, concernant des politiques d’immigration plus strictes et la prolongation de réductions d’impôts pour les particuliers et les sociétés, qui devaient expirer en 2025. Par rapport aux projections de décembre 2024, la croissance mondiale a été révisée à la baisse de 0,1 point de pourcentage pour 2025 et 2026 sous l’effet du poids exercé sur l’activité par les nouveaux droits de douane et l’incertitude toujours élevée entourant la politique commerciale. Le léger affaiblissement de la croissance du PIB mondial en 2026 et 2027 reflète un ralentissement économique attendu en Chine, en raison d’évolutions démographiques défavorables, et une plus faible croissance aux États-Unis, résultant de l’incidence négative à moyen terme des politiques économiques (comme une diminution de l’immigration). Les risques liés à des droits de douane américains supplémentaires, au-delà de ceux actuellement intégrés dans les projections de mars 2025, sont examinés dans l’encadré 2.

La croissance du commerce mondial devrait s’atténuer du fait d’une composition moins favorable de la demande, de la forte incertitude relative aux politiques commerciales et des effets des droits de douane imposés par les États-Unis sur les produits chinois. En 2024, les échanges commerciaux internationaux ont été soutenus dans une certaine mesure par l’anticipation, par les entreprises, de leurs importations d’intrants étrangers, avant d’éventuelles perturbations des échanges commerciaux, notamment aux États-Unis. Ce facteur temporaire devrait toutefois s’estomper progressivement. Dans ce contexte, le commerce mondial devrait se modérer en 2025 en lien avec une composition moins favorable de l’activité — due aux anticipations de commandes — et l’incertitude élevée associée à la politique commerciale. Le commerce mondial pâtirait par ailleurs fortement, sur l’horizon de projection, des droits de douane bilatéraux sur les échanges commerciaux entre les États-Unis et la Chine. La croissance de la demande extérieure adressée à la zone euro devrait également se modérer et revenir de 3,4 % en 2024 à 3,2 % en 2025, puis à 3,1 % en 2026 et 2027. Les révisions à la baisse des projections relatives au commerce mondial par rapport à l’exercice de décembre 2024 reflètent principalement l’incidence des droits de douane sur les importations américaines en provenance de Chine.

Le ralentissement de l’inflation mondiale devrait se poursuivre sur l’horizon de projection, alors que la hausse des prix à l’exportation des concurrents de la zone euro devrait fluctuer juste au-dessus de 2 %, sans changement par rapport à décembre Même si l’atténuation de l’inflation totale mesurée par l’indice des prix à la consommation (IPC) dans les économies avancées semble avoir marqué le pas fin 2024, l’inflation mondiale devrait retrouver sa trajectoire baissière progressive et diminuer de 4,2 % en 2024 à 2,5 % en 2027. L’accalmie sur les marchés du travail des économies avancées devrait se traduire par des hausses moins fortes des salaires nominaux, ce qui permettrait une convergence graduelle de l’inflation totale vers les objectifs des banques centrales. L’inflation totale devrait également se ralentir progressivement dans les économies émergentes. Par rapport aux projections de décembre 2024, l’inflation mondiale serait plus élevée en 2025, sous l’effet de la répercussion des droits de douane sur les prix à la consommation aux États-Unis et en Chine ainsi que d’une dynamique d’inflation plus forte en fin d’année qu’anticipé précédemment. Pour 2026 et 2027, l’inflation mondiale a été revue à la baisse, car l’incidence haussière des droits de douane est plus que compensée par les révisions à la baisse de l’inflation en Chine, dans le contexte d’une diminution persistante des prix à la production et des effets de l’offre excédentaire. La variation des prix à l’exportation des concurrents de la zone euro, exprimés en monnaies nationales et en rythme annuel, est devenue positive en 2024 grâce à la dissipation des effets liés aux reculs antérieurs des prix des matières premières. Elle devrait continuer de fluctuer autour de 2 % sur l’horizon de projection, un niveau globalement conforme à sa moyenne de long terme. Le profil d’évolution est globalement inchangé par rapport aux projections de décembre 2024, en raison d’effets compensateurs liés à la hausse des prix mondiaux des produits alimentaires et à la baisse des prix à la production en Chine. En outre, l’incidence des droits de douane se reflète plus directement dans les prix à l’importation pour les concurrents de la zone euro, tandis que l’effet sur les prix à l’exportation est relativement indirect puisqu’il se transmet via l’augmentation des coûts des consommations intermédiaires dans les chaînes d’approvisionnement, notamment aux États-Unis et en Chine.

Encadré 1
Hypothèses techniques

Par rapport aux projections de décembre 2024, les principales modifications apportées aux hypothèses techniques sont le renchérissement des matières premières et la dépréciation du taux de change, tandis que les hypothèses relatives aux taux d’intérêt sont globalement inchangées. Les hypothèses relatives aux prix du pétrole ont été révisées à la hausse de 4 % pour 2025 et sont globalement inchangées pour le reste de l’horizon de projection, tandis que les hypothèses relatives aux prix du gaz et de l’électricité ainsi qu’au système d’échange de quotas d’émission 1 ont été révisées à la hausse de façon plus importante et sur l’ensemble de l’horizon. Les prix de l’énergie devraient toutefois toujours diminuer sur l’horizon de projection. Les prix des matières premières hors énergie ont été révisés à la hausse pour 2025 en raison d’une hausse des prix mondiaux des matières premières alimentaires. L’euro s’est déprécié de 2,1 % par rapport au dollar et de 1,0 % en termes effectifs nominaux depuis les précédentes projections. Les anticipations des marchés relatives aux taux d’intérêt à court et à long terme sont globalement inchangées.

Tableau

Hypothèses techniques

 

Mars 2025

Révisions par rapport à décembre 2024

2024

2025

2026

2027

2024

2025

2026

2027

Matières premières :

Prix du pétrole (en dollars par baril)

82,0

74,7

70,3

68,7

0,2

4,0

0,2

-0,7

Prix du gaz naturel (en euros par MWh)

34,4

50,2

40,4

31,7

0,2

17,2

15,5

8,2

Prix de gros de l’électricité (en euros par MWh)

77,7

100,6

86,2

75,9

1,4

11,8

8,4

3,1

Quotas au titre du système d’échange de quotas d’émission de l’UE 1 (SEQE-1) (en euros par tonne)

65,2

80,5

83,1

85,5

-0,3

15,6

15,7

15,4

Quotas au titre du système d’échange de quotas d’émission de l’UE 2 (SEQE-2) (en euros par tonne)

-

-

-

59,0

-

-

-

0,0

Prix des matières premières hors énergie, en dollars (variation annuelle en pourcentage)

9,2

12,0

-1,3

-2,8

0,3

6,2

-0,9

-1,1

Taux de change :

Taux de change EUR/USD

1,08

1,04

1,04

1,04

-0,1

-2,2

-2,1

-2,1

Taux de change effectif nominal de l’euro (TCE-41) (T1 1999 = 100)

124,1

122,2

122,2

122,2

-0,1

-1,0

-1,0

-1,0

Hypothèses financières :

Euribor 3 mois
(en pourcentage annuel)

3,6

2,2

2,0

2,1

0,0

0,0

0,0

-0,1

Rendements des emprunts publics à 10 ans
(en pourcentage annuel)

2,9

2,9

3,0

3,2

0,0

0,0

0,0

0,0

Notes : Les révisions sont exprimées en pourcentage pour les niveaux et en points de pourcentage pour les taux de croissance et les pourcentages annuels. Les révisions relatives aux taux de croissance et aux taux d’intérêt sont calculées sur des chiffres arrondis à une décimale, tandis que les révisions exprimées sous forme de variations en pourcentage sont calculées à partir de chiffres non arrondis. Les hypothèses techniques concernant les taux d’intérêt et les prix des matières premières dans la zone euro sont fondées sur les anticipations des marchés, arrêtées au 6 février 2025. Les cours du pétrole se rapportent aux prix au comptant et aux prix des contrats à terme sur le pétrole brut Brent. Les prix du gaz correspondent aux prix au comptant et aux prix des contrats à terme sur le gaz TTF néerlandais. Les prix de l’électricité sont tirés des prix au comptant et des prix des contrats à terme de gros moyens pour les cinq principaux pays de la zone euro. Le prix « synthétique » des contrats à terme correspondant aux quotas au titre du SEQE-1 est calculé comme la valeur linéairement interpolée de fin de mois des contrats à terme sur les quotas d’émission sur les deux bourses européennes de l’énergie les plus proches. Une moyenne des prix mensuels des contrats à terme sur les quotas d’émission est ensuite calculée afin de produire une valeur équivalente à la périodicité annuelle. En l’absence d’échange de quotas au titre du SEQE-2, les hypothèses de prix ont été fixées par nos services au prix de seuil au-dessus duquel des quotas supplémentaires seront mis sur le marché, ce prix étant actualisé aux prix de 2027 (cf. encadré 2 des projections macroéconomiques de décembre 2024 établies par les services de l’Eurosystème pour de plus amples détails). Les trajectoires des cours des matières premières ressortent des contrats à terme dans les dix jours ouvrés précédant la date d’arrêté. Les taux de change bilatéraux devraient rester stables sur l’horizon de projection, aux niveaux moyens relevés pendant les dix jours ouvrés précédant la date d’arrêté. Les hypothèses ayant trait aux rendements nominaux des emprunts publics à dix ans dans la zone euro reposent sur la moyenne des rendements des obligations à dix ans des pays, pondérée par les chiffres annuels du PIB. Lorsque les données nécessaires existent, les rendements nominaux des emprunts publics à dix ans spécifiques à chaque pays sont définis comme les rendements des obligations de référence à dix ans prolongés en utilisant les rendements au pair à terme calculés, à la date d’arrêté, à partir des courbes de rendements correspondantes propres à chaque pays. Pour les autres pays, les rendements des emprunts publics à dix ans spécifiques à chacun sont définis comme le rendement des obligations de référence à dix ans prolongé en utilisant un écart constant (observé à la date d’arrêté) par rapport à l’hypothèse technique relative aux taux d’intérêt sans risque à long terme pour la zone euro.

Encadré 2
Incidence des droits de douane sur les projections de mars 2025

La nouvelle administration américaine a annoncé de multiples droits de douane, dont certains ont été inclus dans les projections de référence de mars 2025. S’il reste difficile d’évaluer le degré de résolution derrière ces annonces de politique économique aux États-Unis, les droits de douane déjà en vigueur lorsque les projections de mars 2025 ont été finalisées (c’est-à-dire le 19 février 2025) ont été pris en compte dans le scénario de référence, à savoir la première série de droits de douane bilatéraux entre les États-Unis et la Chine. D’autres droits de douane qui n’étaient pas encore en place à la date d’arrêté (par exemple, les droits américains sur l’acier et l’aluminium) ou qui ont été reportés (droits américains vis-à-vis du Mexique et du Canada) ou qui n’ont été annoncés que récemment (droits américains vis-à-vis de l’UE et droits supplémentaires imposés à la Chine) n’ont pas été inclus dans les projections de référence.

Les droits de douane intégrés dans les projections de référence de mars 2025 comprennent la première série de droits bilatéraux entre les États-Unis et la Chine. Le 1er février 2025, les États-Unis ont annoncé une hausse de 10 points de pourcentage des droits de douane sur l’ensemble des biens chinois, marquant une étape importante dans le conflit commercial en cours (graphique, partie a). En représailles, la Chine a imposé des droits de douane sur 80 produits américains, dont le gaz naturel liquéfié (GNL), le charbon et les équipements agricoles, augmentant le taux effectif global des droits de douane sur les importations américaines d’un point de pourcentage. En outre, la Chine a mis en œuvre des interdictions d’exportation sur des métaux critiques tels que le tellure et le tungstène. Alors que les droits de douane américains s’appliquent à l’ensemble des biens chinois, qui représentent 13 % des importations américaines, les droits de douane adoptés par la Chine par mesure de rétorsion sont plus ciblés et ne concernent que 1 % des importations chinoises. Cela étant, les taux effectifs globaux de droits de douane, y compris avec ces mesures, sont globalement similaires entre les deux pays.

Les droits de douane bilatéraux entre les États-Unis et la Chine ont entraîné de légères révisions des projections relatives à la croissance et à l’inflation aux États-Unis et en Chine. L’incidence des droits de douane a été estimée à l’aide de modèles macroéconomiques de la BCE, qui comprennent une série de modèles semi-structurels ainsi que multi-pays et multi-secteurs. La projection d’inflation aux États-Unis a été révisée à la hausse d’environ 0,2 point de pourcentage pour 2025. Selon les estimations, la réduction du pouvoir d’achat due aux droits de douane pèserait négativement sur la croissance du PIB en volume des États-Unis, à hauteur d’environ 0,1 point de pourcentage en 2025 et dans une mesure négligeable en 2026. Les retombées des droits de douane américains sur l’économie chinoise sont considérés comme relativement modestes, quoique plus importantes que pour l’économie américaine, les pertes d’exportations impliquant une révision à la baisse de la croissance du PIB en volume chinois d’environ 0,2 point de pourcentage pour 2025 et de 0,1 point de pourcentage supplémentaire tant en 2026 qu’en 2027. L’incidence sur l’inflation chinoise est faible (0,1 point de pourcentage de plus en 2025).

L’incidence de ces droits de douane bilatéraux sur les projections pour la zone euro est limitée, même si la Chine pourrait reproduire des schémas passés de réorientation des échanges. En 2018, les droits de douane appliqués par les États-Unis sur les biens chinois ont entraîné une réorientation des exportations chinoises vers d’autres marchés, les chaînes d’approvisionnement américaines ayant été reconfigurées afin de réduire les importations directes en provenance de Chine. Si la Chine détourne ses exportations des États-Unis, la zone euro pourrait subir une perte de compétitivité tant sur son marché intérieur que sur les marchés tiers. Dans le même temps, la capacité de la zone euro à gagner des parts de marché aux États-Unis pourrait être restreinte, en raison des différences de qualité et de prix de son panier d’exportations par rapport aux produits chinois. Dans l’ensemble, toutefois, l’effet de ces droits de douane sur la croissance dans la zone euro ne devrait être que légèrement négatif. S’agissant de l’inflation dans la zone euro, les droits de douane inclus dans le scénario de référence devraient avoir peu d’incidence, dans la mesure où leur effet haussier sur les prix à l’importation via l’augmentation des coûts le long des chaînes d’approvisionnement devrait être globalement contrebalancée par l’effet baissier du surcroît d’offre de biens en provenance de Chine sur les marchés européens.

Les annonces relatives aux droits de douane ont également accru l’incertitude relative aux politiques commerciales, ce qui a entraîné des révisions à la baisse des perspectives d’activité économique dans le monde et la zone euro. L’incertitude relative aux politiques commerciales s’est fortement accrue depuis l’élection présidentielle aux États-Unis (graphique, partie b). Selon les estimations, elle freinerait l’investissement et les exportations et, dans une moindre mesure, la consommation, étant donné que les entreprises et les consommateurs, dans la zone euro comme dans le reste du monde, devraient adopter une attitude plus prudente en matière de dépenses dans un environnement commercial imprévisible. L’augmentation de l’incertitude relative aux politiques commerciales au cours des derniers mois devrait réduire la croissance mondiale (hors zone euro) d’environ 0,1 point de pourcentage sur la période 2025-2026, en raison d’une baisse de l’investissement et des exportations. Le degré d’ouverture de l’économie de la zone euro étant plus élevé et la composition de ses exportations davantage orientée vers les biens durables, elle devrait subir des effets légèrement plus prononcés avec une contraction de la croissance de son PIB en volume d’environ 0,2 point de pourcentage en termes cumulés sur la période 2025-2026. Cela explique environ la moitié des révisions cumulées à la baisse de la croissance de la zone euro dans les projections de mars 2025.

Graphique

Taux effectifs de droits de douane entre les États-Unis et la Chine et évolutions de l’incertitude relative aux politiques commerciales

a) Taux effectifs de droits de douane

b) Incertitude relative aux politiques commerciales

(en pourcentage)

(indice)

Sources : Échanges en valeur ajoutée (Trade in Value Added, TiVA) de l’OCDE, base de données BACI du CEPII, Peter Institute for International Economics (PIIE), Haver Analytics, Caldare, D., Iacoviello, M., Molligo, P., Prestipino, A. et Raffo, A., « The economic effects of trade policy uncertainty » (les effets économiques de l’incertitude commerciale), Journal of Monetary Economics, vol. 109, janvier 2020, pp. 38-59 et calculs des services de la BCE.
Notes : Dans la partie a), les droits de douane antérieurs aux annonces récentes sont fondés sur l’approche par les revenus utilisant les données de 2024. Les droits de douane supplémentaires sont calculés en pondérant les droits de douane annoncés par la part des importations des biens concernés. Dans la partie b), la zone grise correspond à la période de la première présidence Trump. L’indice d’incertitude relative aux politiques commerciales repose sur des recherches de texte automatisées dans sept journaux (Boston Globe, Chicago Tribune, Guardian, Los Angeles Times, New York Times, Wall Street Journal et Washington Post). La mesure est calculée en comptant la fréquence mensuelle des articles traitant de l’incertitude relative aux politiques commerciales (en pourcentage du nombre total d’articles) pour chaque journal. L’indice est ensuite normalisé à une valeur de 100 pour une part de 1 % des articles (cf. le trade policy uncertainty index website - site Internet de l’indice d’incertitude relative aux politiques commerciales).

Les droits de douane imposés par les États-Unis sur les produits en provenance du Canada et du Mexique, qui n’ont pas été intégrés dans les projections de référence de mars 2025, pourraient avoir des effets importants, en particulier sur les économies concernées. Des droits de douane vis-à-vis du Mexique et du Canada ont été annoncés le 1er février, mais reportés quelques jours plus tard. Au moment de la finalisation des projections de mars 2025, ils demeuraient trop incertains pour être inclus dans le scénario de référence. Des simulations utilisant le modèle mondial de la BCE montrent que ces droits de douane pourraient nettement accroître l’inflation (de 0,6 point de pourcentage) et réduire la croissance du PIB en volume (de 0,1 point) aux États-Unis, en données cumulées sur l’horizon de projection. Selon d’autres simulations, effectuées sur la base des modèles BASE et mondial de la BCE, l’incidence sur l’économie réelle de la zone euro seraient limitée grâce à des forces agissant en sens contraire. En effet, un gain de compétitivité contrebalancerait une baisse de la demande mondiale. Un léger effet négatif sur les prix pourrait cependant être observé dans la zone euro.

De nouvelles annonces de droits de douane décidés par les États-Unis, qui n’étaient pas encore en vigueur lors de la finalisation des projections de mars 2025, n’ont pas non plus été intégrées dans le scénario de référence, car leur mise en œuvre est entourée d’un degré élevé d’incertitude. Le 10 février, l’administration américaine a annoncé que des droits de douane à hauteur de 25 % seraient rétablis le 12 mars sur l’acier et l’aluminium. En raison de la faible part de ces biens dans les importations américaines (2 %), l’incidence devrait être globalement limitée. Le président Trump a demandé à ses conseillers, le 12 février, d’élaborer un plan complet de droits de douane réciproques, a annoncé le 18 février des droits de douane mondiaux sur les voitures, les produits pharmaceutiques et les semi-conducteurs, a souhaité le 21 février un réexamen des relations avec les partenaires commerciaux dans le domaine des services numériques, a lancé le 25 février une enquête sur les droits de douane portant sur le cuivre et a annoncé le 26 février des droits de douane de 25 % sur les importations en provenance d’Europe ainsi que, le 27 février, des droits de douane supplémentaires de 10 % sur les importations en provenance de Chine. Enfin, le mémorandum « America First Trade Policy » (politique commerciale l’Amérique d’abord) signé par le président Trump le 20 janvier 2025 pourrait donner lieu à des droits de douane supplémentaires, notamment pour des raisons de sécurité nationale. Dans l’ensemble, il existe actuellement une grande incertitude quant à l’objectif, à la taille et au calendrier des futurs droits de douane ainsi qu’à la réaction des pays qui seraient concernés. Compte tenu du degré élevé d’ouverture de l’économie de la zone euro, dont les États-Unis sont un partenaire commercial essentiel, la mise en œuvre de nouveaux droits de douane par l’administration américaine et l’incertitude qui en découle font peser des risques sur les perspectives économiques de la zone euro.

3 Économie réelle

L’activité économique dans la zone euro a progressé de 0,1 % au quatrième trimestre 2024 (graphique 1). La consommation privée et la consommation publique ont apporté des contributions positives à la croissance, qui ont toutefois été largement compensées par la baisse des exportations. Le résultat est inférieur de 0,1 point de pourcentage aux anticipations des services de l’Eurosystème dans les projections de décembre 2024, en raison d’un affaiblissement des exportations, même si la croissance du PIB en volume des trimestres précédents a été légèrement révisée à la hausse. Au second semestre 2024, la consommation, privée comme publique, a été un peu plus dynamique qu’attendu. L’activité dans tous les secteurs industriels se serait encore repliée au quatrième trimestre, dans un contexte d’atonie de la demande de biens, de persistance de l’incidence négative du resserrement passé de la politique monétaire, de pertes continues de compétitivité et de fortes incertitudes relatives aux politiques commerciales. L’activité dans le secteur des services aurait continué de croître.

Graphique 1

PIB en volume de la zone euro

a) Croissance du PIB en volume

(variations trimestrielles en pourcentage ; données trimestrielles corrigées des variations saisonnières et du nombre de jours ouvrés)

b) Niveau du PIB en volume

(volumes chaînés (2020) ; en milliards d’euros)

Notes : Les données rétrospectives peuvent différer des dernières publications d’Eurostat en raison de dates de publication postérieures à la date d’arrêté des projections. La ligne verticale indique le début de l’horizon de projection. Dans la partie a), les fourchettes autour des projections centrales donnent une indication du degré d’incertitude et sont construites de manière symétrique. Elles sont calculées à partir d’erreurs de projection antérieures, après correction des valeurs extrêmes. Ces intervalles, du plus foncé au plus clair, reflètent différents degrés de probabilité (30 %, 60 % et 90 %) que la croissance effective du PIB en volume se situe à l’intérieur des fourchettes correspondantes. Pour plus d’informations, cf. l’encadré intitulé « Illustration de l’incertitude entourant les projections » figurant dans les projections macroéconomiques de mars 2023 pour la zone euro établies par les services de la BCE.

Les dernières données disponibles vont dans le sens d’une croissance modeste tirée par les services début 2025, qui serait freinée par les incertitudes élevées entourant les politiques économiques dans la zone euro et les politiques commerciales. Les indicateurs tirés d’enquêtes demeurent modérés, même si la plupart se sont légèrement renforcés en janvier. À titre d’exemple, l’indice composite des directeurs d’achat relatif à la production s’est établi à 50,2 en janvier, contre 49,3 en moyenne au quatrième trimestre 2024. Les données les plus récentes continuent de faire état de différences sectorielles. L’activité dans le secteur industriel est restée fortement atone, comme en atteste l’indice des directeurs d’achat relatif à la production manufacturière pour janvier, qui signale toujours une contraction. En revanche, l’activité dans les services a continué de progresser, l’indice des directeurs d’achat relatif à la production de services et aux nouvelles commandes indiquant une expansion en janvier, signe d’une poursuite de la croissance[3]. Même si le scénario de référence des projections ne tient compte que de l’incidence des nouveaux droits de douane entre les États-Unis et la Chine, les effets négatifs de l’incertitude liée à l’hypothèse de nouvelles révisions des politiques commerciales mondiales, en particulier vis-à-vis de l’Union européenne, devraient peser sur les exportations de la zone euro et l’investissement en son sein (encadré 2). Dans l’ensemble, l’activité économique de la zone euro devrait croître de 0,2 % au cours des trois premiers trimestres de 2025.

À moyen terme, la croissance du PIB en volume se renforcerait, soutenue par l’augmentation la consommation, le redressement de l’investissement et de la demande étrangère ainsi que par la dissipation des effets modérateurs du resserrement passé de la politique monétaire (tableau 3). La croissance de la consommation privée devrait bénéficier de l’amélioration continue du pouvoir d’achat des ménages, attribuable à une ferme progression des salaires et de l’emploi ainsi qu’au ralentissement de l’inflation. La reprise à moyen terme s’appuierait sur les dépenses des ménages, qui bénéficieraient aussi de la baisse du taux d’épargne par rapport aux niveaux actuels encore élevés. La vigueur du marché du travail, malgré une accalmie, et l’hypothèse d’un redressement progressif de la confiance des consommateurs devraient également contribuer à la croissance de la consommation privée. L’investissement devrait graduellement se renforcer sur l’horizon de projection, principalement en raison de l’atténuation du frein exercé par le resserrement passé de la politique monétaire, du soutien lié à l’augmentation des bénéfices, du déploiement des fonds alloués dans le cadre du programme NGEU et de l’accroissement de la demande intérieure et extérieure. Cette dernière soutiendrait aussi la croissance des exportations, mais l’incertitude relative aux politiques commerciales, conjuguée aux défis persistants en matière de compétitivité dans la zone euro, devrait se traduire par un nouveau recul des parts de marché à l’exportation. Le retrait en cours des mesures budgétaires discrétionnaires mises en œuvre lors de la pandémie et face à la crise énergétique devrait continuer d’exercer un léger effet négatif sur la croissance du PIB au cours de la période 2025-2027.

Tableau 3

Projections relatives au PIB en volume, aux échanges commerciaux et au marché du travail

(variations annuelles en pourcentage, sauf indication contraire ; révisions en points de pourcentage)

 

Mars 2025

Révisions par rapport à décembre 2024

2024

2025

2026

2027

2024

2025

2026

2027

PIB en volume

0,8

0,9

1,2

1,3

0,1

-0,2

-0,2

0,0

Consommation privée

1,0

1,4

1,2

1,2

0,1

0,1

-0,1

0,0

Consommation publique

2,5

1,2

1,1

1,0

0,2

0,0

-0,1

0,0

Investissement

-1,8

1,2

1,7

1,4

-0,1

0,0

-0,5

-0,2

Exportations1)

0,9

0,8

2,3

2,7

-0,1

-0,8

-0,7

-0,3

Importations1)

0,1

1,9

2,6

2,8

0,0

-0,4

-0,5

-0,1

Contribution au PIB :

demande intérieure

0,7

1,2

1,3

1,2

0,1

0,0

-0,1

0,0

exportations nettes

0,4

-0,5

0,0

0,1

-0,1

-0,3

-0,1

0,0

variations des stocks

-0,3

0,1

0,0

0,0

0,0

-0,1

0,0

0,0

Revenu réel disponible

2,5

0,9

0,8

0,7

0,2

0,1

-0,2

-0,1

Taux d’épargne des ménages (en % du revenu disponible)

15,1

14,7

14,4

14,0

0,0

0,0

-0,1

-0,2

Emploi2)

0,9

0,4

0,4

0,4

0,1

0,0

-0,2

-0,1

Taux de chômage

6,4

6,3

6,3

6,2

0,0

-0,2

0,0

0,1

Compte courant (% du PIB)

2,6

2,0

2,2

2,3

-0,1

-0,6

-0,5

-0,6

Notes : Les projections relatives au PIB en volume et à ses composantes sont fondées sur des données corrigées des variations saisonnières et des jours ouvrés. Les données rétrospectives peuvent différer des dernières publications d’Eurostat en raison de dates de publication postérieures à la date d’arrêté des projections. Les révisions sont calculées à partir de chiffres arrondis. Les données (y compris trimestrielles) peuvent être téléchargées à partir de la base de données sur les projections macroéconomiques (Macroeconomic Projection Database) du site Internet de la BCE.
1) Y compris les échanges commerciaux intra-zone euro.
2) Personnes employées.

L’incidence sur la croissance du resserrement passé de la politique monétaire aurait atteint son niveau maximal en 2024 et devrait s’estomper sur l’horizon de projection, sous l’effet de la réduction en cours des taux d’intérêt directeurs. Les effets des mesures de politique monétaire prises entre décembre 2021 et septembre 2023 continuent de se transmettre à l’économie réelle. L’essentiel de l’effet modérateur sur la croissance se serait cependant déjà matérialisé. Après les baisses des taux directeurs réalisées depuis juin 2024, et sur la base des anticipations des marchés relatives à la trajectoire future des taux d’intérêt à la date d’arrêté des projections (encadré 1), l’incidence négative du resserrement passé de la politique monétaire sur la croissance économique devrait s’amenuiser en 2025. Une incertitude considérable entoure toutefois l’évolution exacte de cette dissipation.

Par rapport aux projections macroéconomiques de décembre 2024 établies par les services de l’Eurosystème, la croissance du PIB en volume a été révisée à la baisse, de 0,2 point de pourcentage pour 2025 et 2026, mais reste globalement inchangée pour 2027 (tableau 3 et graphique 2, partie b). La révision à la baisse pour 2025 reflète en partie des effets de report découlant de données nettement inférieures aux anticipations en ce qui concerne l’investissement et les exportations au quatrième trimestre 2024, qui ne devraient pas être compensées en 2025. De plus, les taux de croissance trimestriels ont été revus à la baisse pour 2025 et 2026 du fait des incertitudes persistantes entourant les politiques économiques et des défis en matière de compétitivité. En dépit d’un effet de report de ces révisions jusqu’en 2027, le taux de croissance projeté pour cette année-là reste inchangé, à 1,3 %. Dans l’ensemble, les révisions des hypothèses n’ont qu’une faible incidence au long de l’horizon de projection, l’effet haussier lié à la dépréciation de l’euro et aux révisions des hypothèses budgétaires étant largement compensé par l’affaiblissement de la demande extérieure et le relèvement des hypothèses relatives aux prix de l’énergie (section 2 et encadré 1).

Graphique 2

Croissance du PIB en volume de la zone euro – ventilation des principales composantes de la dépense

a) Projections de mars 2025 établies par les services de la BCE

b) Révisions par rapport aux projections de décembre 2024 établies par les services de l’Eurosystème

(variations annuelles en pourcentage et contributions en points de pourcentage)

(en points de pourcentage et contributions en points de pourcentage)

Notes : Les données sont corrigées des variations saisonnières et du nombre de jours ouvrés. Les données rétrospectives peuvent différer des dernières publications d’Eurostat en raison de dates de publication postérieures à la date d’arrêté des projections. La ligne verticale indique le début de l’horizon de projection. Les révisions sont calculées sur la base de chiffres non arrondis.

La reprise attendue de la consommation privée est soutenue par une forte progression de la rémunération du travail, dans un contexte de hausse des salaires et de recul de l’inflation. La croissance de la consommation privée, qui a été solide au troisième trimestre 2024, se serait modérée au quatrième trimestre, en raison notamment de la dissipation des facteurs temporaires dont elle a bénéficié à l’été. Les dépenses des ménages se renforceraient et croîtraient de 1,3 % en rythme annuel en 2025-2027, après environ 0,9 % en 2023-2024 (graphique 3). La consommation privée est soutenue par la hausse du revenu réel disponible, essentiellement due à la progression toujours vigoureuse des salaires, qui devrait toutefois se ralentir à mesure de l’atténuation du rattrapage des salaires réels, ainsi que par le dynamisme des revenus hors travail (en particulier, le revenu du travail indépendant et tiré des actifs financiers et non financiers). En outre, la croissance de la consommation privée devrait bénéficier d’une baisse modérée du taux d’épargne par rapport à son niveau actuellement élevé, traduisant une normalisation progressive du comportement en matière de dépenses de consommation. L’amélioration attendue de la confiance des consommateurs et le lissage de la consommation, c’est-à-dire une réaction différée des dépenses des ménages à l’augmentation de leur pouvoir d’achat, devraient également contribuer à la diminution progressive de l’épargne. Le taux d’épargne des ménages devrait toutefois rester élevé, reflétant le niveau toujours élevé des taux proposés aux ménages pour leurs emprunts et leurs dépôts et l’accès difficile au crédit. Par rapport aux projections de décembre 2024, la croissance de la consommation privée a été révisée à la hausse, de 0,1 point de pourcentage pour 2024 et 2025, du fait d’une dynamique plus forte des données antérieures relatives au revenu réel disponible. Malgré une légère révision à la baisse pour 2026, l’évolution de la consommation privée à moyen terme reste globalement conforme aux projections de décembre 2024.

Graphique 3

Ventilation de la croissance de la consommation privée en volume dans la zone euro

(variations annuelles en pourcentage et contributions en points de pourcentage)

Notes : Les données sont corrigées des variations saisonnières et du nombre de jours ouvrés. Une augmentation du taux d’épargne des ménages implique une contribution négative de l’épargne à la croissance de la consommation. Les données rétrospectives peuvent différer des dernières publications d’Eurostat en raison de dates de publication postérieures à la date d’arrêté des projections. Les écarts statistiques entre les comptes nationaux et sectoriels et leurs différents calendriers de publication entraînent de légères différences entre les chiffres relatifs à la croissance de la consommation privée et les contributions respectives du revenu et de la variation (inversée) du taux d’épargne des ménages. La ligne verticale indique le début de l’horizon de projection.

L’investissement dans l’immobilier résidentiel continuerait de se replier légèrement à court terme, avant de se redresser à mesure de l’assouplissement progressif des conditions de financement et de la poursuite de la hausse du revenu réel des ménages. Le recul prolongé de l’investissement dans l’immobilier résidentiel se serait poursuivi au quatrième trimestre 2024 et devrait encore diminuer légèrement à court terme. Cette évolution traduit la faiblesse actuelle de la demande de logements, qui se reflète dans la baisse continue du nombre de permis de construire pour des logements. L’investissement dans l’immobilier résidentiel se redresserait à partir du second semestre 2025, la réduction des taux hypothécaires depuis fin 2023 ayant probablement un effet positif sur la demande de logements, qui bénéficierait également de la hausse continue des revenus réels des ménages. Après une baisse significative en 2024 et une contraction attendue plus faible en 2025, l’investissement dans l’immobilier résidentiel devrait augmenter en rythme annuel en 2026 pour la première fois depuis 2022, puis croître encore en 2027.

L’investissement des entreprises devrait se contracter à court terme, dans un contexte d’incertitude accrue, mais se redresser plus tard sur l’horizon, grâce à l’amélioration progressive de la demande, l’assouplissement des conditions de financement et les retombées positives des fonds NGEU. L’investissement des entreprises de la zone euro aurait diminué en 2024. Il resterait atone à court terme, compte tenu des incertitudes persistantes liées à la fois à l’évolution des politiques économiques dans la zone euro et, plus largement, aux préoccupations géopolitiques et commerciales au niveau mondial. En l’absence de perturbations majeures des échanges internationaux, l’investissement se redresserait graduellement sur l’horizon de projection, à mesure que les incertitudes actuelles se dissipent et que les conditions de financement s’améliorent, et sous l’effet également des décaissements en cours des fonds NGEU, qui devraient attirer davantage d’investissements privés. Dans l’ensemble, l’investissement des entreprises devrait croître faiblement sur la période 2025-2026, avant de progresser plus vigoureusement en 2027.

Après de nets fléchissements fin 2024, la croissance des exportations de la zone euro continuerait de pâtir des défis en matière de compétitivité. Les données récentes indiquent une poursuite des mauvais résultats avec des exportations de la zone euro qui peinent à suivre le rythme de la demande mondiale. Dans les exercices de projection récents, les exportations et les parts de marché à l’exportation de la zone euro ont systématiquement surpris à la baisse (graphique 4). La demande extérieure adressée à la zone euro n’a pas fait l’objet de telles révisions à la baisse, ce qui atteste des problèmes de compétitivité. Les exportations et les parts de marché à l’exportation de la zone euro se sont contractées au quatrième trimestre 2024. Si la volatilité des données irlandaises a contribué à ce recul, la faiblesse récente est cohérente avec les indicateurs tirés d’enquêtes qui signalent une croissance modérée des exportations à court terme. De plus, l’incertitude accrue relative aux politiques commerciales pèse elle aussi sur les perspectives de croissance des exportations de la zone euro. Par conséquent, la croissance des exportations ne devrait se redresser que très faiblement en 2025, à des taux inférieurs aux moyennes sur longue période. À moyen terme, alors qu’une reprise de la demande extérieure devrait soutenir la croissance des exportations de la zone euro, des facteurs défavorables tels que la concurrence chinoise, les coûts élevés de l’énergie et les défis croissants de compétitivité dans certains secteurs de la haute technologie continuent d’assombrir les perspectives. Les exportations de la zone euro progresseraient donc à un rythme inférieur aux moyennes sur longue période. La croissance des importations serait également modérée, à un rythme légèrement inférieur à la tendance de long terme, sous l’effet du ralentissement des exportations et de l’investissement. Dans l’ensemble, les exportations nettes devraient apporter une contribution négative à la croissance en 2025 (– 0,5 point de pourcentage, contre – 0,2 point de pourcentage dans les projections de décembre 2024) et une contribution globalement neutre sur le reste de l’horizon de projection.

Graphique 4

Parts de marché à l’exportation de la zone euro

(indice 2019 = 100)

Notes : La ligne verticale indique le début de l’horizon de projection. Les lignes grises correspondent aux projections des services de la BCE et de l’Eurosystème depuis mars 2020. Les parts de marché à l’exportation de la zone euro sont calculées en divisant les exportations hors zone euro par la demande extérieure adressée à la zone euro.

Le marché du travail resterait globalement solide, même si la croissance de l’emploi devrait se ralentir par rapport aux dernières années. L’emploi a légèrement crû au quatrième trimestre 2024, de façon globalement conforme aux projections de décembre. Il devrait poursuivre sa progression à un rythme trimestriel toujours modéré sur l’horizon de projection. En termes annuels, la croissance de l’emploi reviendrait de 1,4 % en 2023 à 0,9 % en 2024 et 0,4 % sur la période 2025-2027 (0,2 point de pourcentage de moins en 2026 qu’anticipé dans les projections de décembre et 0,1 point de pourcentage de moins en 2027) (graphique 5). Les facteurs conjoncturels qui ont soutenu l’emploi plus que d’habitude ces dernières années, tels que le maintien de sureffectifs du fait des importantes pénuries de main-d’œuvre, la forte croissance des bénéfices, la faiblesse des salaires réels et la forte progression de la population active, vont progressivement se dissiper. Par rapport aux projections précédentes, la dissipation d’une partie de ces facteurs favorables serait désormais plus rapide. Par conséquent, en comparaison avec la croissance du PIB, la croissance de l’emploi devrait être un peu plus modérée qu’attendu dans les projections précédentes.

Graphique 5

Emploi

(indice, T1 2022 = 100)

Note : La ligne verticale indique le début de l’horizon de projection.

La croissance de la productivité du travail se renforcerait à un rythme plus modéré en 2025-2026 qu’anticipé dans les précédentes projections. La hausse de la productivité (par personne employée) a surpris défavorablement au quatrième trimestre 2024 et devrait se redresser à un rythme plus lent en 2025 qu’envisagé dans les projections de décembre. Elle devrait passer de – 0,1 % en 2024 à 0,4 % en 2025 et à 0,8-0,9 % en 2026-2027. À titre de comparaison, le taux de croissance annuel moyen de la productivité par personne employée était de 0,6 % sur la période 2000-2019. Les facteurs conjoncturels à l’œuvre récemment, qui se sont traduits par une augmentation des sureffectifs, une faiblesse des salaires réels et une croissance soutenue de la population active, devraient désormais se dissiper un peu plus rapidement qu’anticipé dans les précédentes projections (graphique 6). Par conséquent, l’hypothèse actuelle est celle d’une croissance de la productivité qui se renforce à la fin de l’horizon de projection. Comme dans les précédentes projections, le rythme de la reprise en 2025 et 2026 serait limité par des facteurs structurels, tels que la réallocation progressive de l’activité économique vers le secteur des services, les coûts de transition vers le verdissement de l’économie, une incidence négative plus durable du choc sur les prix de l’énergie, l’adoption plus lente que prévu de technologies d’IA hautement innovantes et les évolutions démographiques.

Graphique 6

Productivité du travail par personne employée

(indice, T1 2022 = 100)

Note : La ligne verticale indique le début de l’horizon de projection.

Le taux de chômage resterait relativement stable à des niveaux faibles sur l’horizon de projection (graphique 7). Le taux de chômage au quatrième trimestre 2024 était inférieur de 0,2 point de pourcentage à ce qui était envisagé dans les projections de décembre. Il devrait augmenter légèrement en 2025, avant de reculer de nouveau à partir du deuxième trimestre 2026, pour revenir à 6,2 % en 2027, sous l’effet de la poursuite, quoiqu’à un rythme modéré, de la reprise économique. Le taux de chômage a été révisé à la baisse pour 2025, de 0,2 point de pourcentage, en raison des données récentes, et à la hausse pour 2027, de 0,1 point de pourcentage, du fait du ralentissement attendu de la croissance de l’emploi, conformément aux révisions des perspectives de croissance. Comme dans les projections de décembre 2024, la croissance de la population active devrait revenir à des niveaux nettement inférieurs à ceux observés ces dernières années.

Graphique 7

Taux de chômage

(en % de la population active)

Note : La ligne verticale indique le début de l’horizon de projection.

4 Perspectives budgétaires

Après le durcissement significatif estimé pour 2024, l’orientation budgétaire de la zone euro[4] ne se resserrerait que faiblement en 2025, serait neutre en 2026, puis deviendrait à nouveau plus restrictive, un peu plus notablement, en 2027 (cf. tableau 4). L’ampleur du resserrement budgétaire en 2024 a été déterminée par d’importants facteurs non discrétionnaires ainsi que par le retrait de la plupart des mesures de soutien en matière d’énergie et d’inflation. Les facteurs non discrétionnaires ont principalement traduit les évolutions très favorables des recettes dans certains pays, surtout en raison d’effets de composition (les assiettes fiscales croissant plus rapidement que le PIB nominal) et d’autres facteurs considérés comme temporaires. Pour 2025, les mesures budgétaires discrétionnaires – conformément aux plans des gouvernements des pays de la zone euro, dont certains n’ont pas encore entièrement été approuvés par les parlements nationaux – vont dans le sens d’un resserrement, illustrant essentiellement des hausses de la fiscalité et des cotisations de sécurité sociale. Ce resserrement est largement compensé par la hausse de l’investissement public et des transferts budgétaires ainsi que par l’assouplissement budgétaire dû à des facteurs non discrétionnaires[5]. En 2026, l’orientation budgétaire demeurerait globalement neutre. En ce qui concerne 2027, le resserrement relativement marqué de l’orientation budgétaire et des mesures discrétionnaires refléterait principalement l’hypothèse d’une diminution de l’investissement public et des transferts budgétaires liés à l’expiration des subventions accordées au titre du programme NGEU[6]. Dans l’ensemble, du fait d’un retrait seulement partiel du large soutien financier apporté par les pouvoirs publics depuis la pandémie, l’orientation budgétaire cumulée sur la période 2020-2027 resterait accommodante.

Tableau 4

Perspectives budgétaires pour la zone euro

(en pourcentage du PIB ; révisions en points de pourcentage)

 

Mars 2025

Révisions par rapport
à décembre 2024

2024

2025

2026

2027

2024

2025

2026

2027

Orientation budgétaire1)

0,9

0,2

0,0

0,5

0,0

0,1

-0,1

-0,1

Solde budgétaire des adm. publiques

-3,2

-3,2

-3,3

-3,3

0,0

-0,1

-0,3

-0,4

Solde budgétaire structurel2)

-3,0

-3,0

-3,1

-3,1

0,1

0,0

-0,1

-0,2

Dette brute des admin. publiques

87,7

88,4

89,4

89,8

-0,1

0,1

0,7

1,2

1) L’orientation budgétaire est mesurée comme la variation du solde primaire corrigé du cycle, déduction faite du soutien des pouvoirs publics au secteur financier. Les chiffres indiqués sont également ajustés pour tenir compte des subventions au titre du programme NGEU, qui n’ont pas d’incidence sur l’économie du côté des recettes. Un chiffre négatif (positif) implique un assouplissement (durcissement) de l’orientation budgétaire.
2) Le solde budgétaire structurel est calculé net des effets transitoires du cycle économique et des mesures considérées comme temporaires selon la définition du Système européen de banques centrales.

Par rapport aux projections de décembre 2024, les mesures discrétionnaires indiquent un certain assouplissement budgétaire. Cette évolution s’explique principalement par une progression de la consommation publique, particulièrement en 2024, une réduction de la fiscalité directe et indirecte en 2025 et une augmentation des transferts budgétaires en 2026-2027. Les révisions des mesures se traduisent largement par une orientation budgétaire dans l’ensemble légèrement plus accommodante sur l’horizon de projection.

Les perspectives budgétaires de la zone euro se sont détériorées par rapport aux projections de décembre, dans la mesure où le solde budgétaire devrait uniquement se stabiliser en dessous du seuil de -3 % du PIB alors que le ratio de dette devrait augmenter (tableau 4). Le solde budgétaire de la zone euro devrait rester globalement inchangé sur l’horizon de projection (et s’établir à -3,3 % du PIB en 2027). Cette trajectoire suit principalement le solde primaire corrigé du cycle, qui se serait nettement amélioré en 2024 et ne devrait se contracter que très légèrement par la suite. La composante conjoncturelle continuerait de se dégrader en 2025 et demeurerait globalement inchangée sur la période 2026-2027. Les paiements d’intérêts augmenteraient progressivement sur l’horizon de projection. Par comparaison avec les projections de décembre, le solde budgétaire a été revu à la baisse pour la période comprise entre 2025 et 2027, sous l’effet de l’assouplissement budgétaire cumulé ressortant des mesures discrétionnaires et de la détérioration des perspectives macroéconomiques. Le ratio dette/PIB de la zone euro devrait s’orienter à la hausse étant donné que les déficits primaires continus et les ajustements déficit-dette positifs devraient plus que compenser les écarts favorables entre taux d’intérêt et taux de croissance. Par rapport aux projections de décembre, le ratio de dette a été révisé à la hausse, essentiellement en raison de l’augmentation des déficits primaires et des écarts entre taux d’intérêt et taux de croissance. Les projections budgétaires de la zone euro restent entourées d’une grande incertitude, notamment du fait des tensions géopolitiques actuelles et des mesures susceptibles d’être prises par les gouvernements de la zone euro dans ce contexte, en particulier concernant une hausse des dépenses de défense.

5 Prix et coûts

À court terme, l’inflation totale ne devrait que très légèrement diminuer, pour s’établir à 2,3 % en moyenne en 2025, avant de revenir à 1,9 % en 2026 et 2,0 % en 2027 (graphiques 8 et 9). L’inflation totale ne devrait ralentir que faiblement dans le courant de 2025. Cette évolution s’explique principalement par la progression plus forte des prix des produits alimentaires et les effets de base haussiers liés aux prix de l’énergie, qui compenseront largement l’incidence baissière du ralentissement de l’inflation mesurée par l’IPCHX. Avec l’atténuation des effets de base relatifs à la composante énergie, l’inflation totale devrait se replier à 2,0 % début 2026 et se maintenir à un niveau égal ou légèrement inférieur à l’objectif de 2 % jusqu’à la fin de l’horizon de projection. En 2027, le taux d’inflation de 2,0 % attendu tient compte d’un effet haussier temporaire des prix de l’énergie dû à l’introduction d’un nouveau système d’échange de quotas d’émission (SEQE-2). L’augmentation de l’IPCHX devrait se ralentir sur l’ensemble de l’horizon de projection, pour s’établir à 1,9 % d’ici 2027.

Graphique 8

Hausse des prix mesurée par l’IPCH dans la zone euro

(variations annuelles en pourcentage)

Notes : La ligne verticale indique le début de l’horizon de projection. Les fourchettes de projection donnent une indication du degré d’incertitude et sont construites de manière symétrique. Elles sont calculées à partir d’erreurs de projection antérieures, après correction des valeurs extrêmes. Les intervalles, du plus foncé au plus clair, reflètent différents degrés de probabilité (30 %, 60 % et 90 %) que la hausse effective de l’IPCH se situe à l’intérieur des fourchettes correspondantes. Pour plus d’informations, cf. l’encadré intitulé « Illustration de l’incertitude entourant les projections » figurant dans les projections macroéconomiques de mars 2023 pour la zone euro établies par les services de la BCE.

Graphique 9

Hausse des prix mesurée par l’IPCH dans la zone euro – ventilation des principales composantes

(variations annuelles en pourcentage ; en points de pourcentage)

Note : La ligne verticale indique le début de l’horizon de projection.

L’évolution des prix de l’énergie devrait rester positive sur l’ensemble de l’horizon de projection, après deux années de baisse. Elle resterait modérée après un rebond lié à des effets de base au second semestre 2025. En 2026 et 2027, ces prix devraient continuer de progresser, mais à des taux inférieurs à la moyenne de long terme, malgré un effet de base baissier significatif au premier trimestre 2026 et un recul attendu des prix des matières premières énergétiques (graphique 10, partie a). L’accélération, de 0,1 % en 2026 à 2,3 % en 2027, reflète en grande partie l’incidence haussière temporaire découlant de la mise en œuvre du paquet « Ajustement à l’objectif 55 » de l’UE, en particulier le SEQE-2 pour le chauffage des bâtiments et les carburants destinés aux transports[7].

La hausse des prix des produits alimentaires devrait s’accentuer provisoirement courant 2025, avant de ralentir quelque peu et de se stabiliser globalement (graphique 10, partie b). Après la décélération des derniers mois, l’augmentation des prix des produits alimentaires devrait à nouveau se renforcer et atteindre des taux autour de 3,0 % au troisième trimestre 2025, sous l’impulsion, du moins dans un premier temps, d’un effet de base haussier lié au renchérissement des produits alimentaires non transformés et, par la suite, des fortes hausses attendues des prix des matières premières. Elle devrait ensuite revenir à 2,2 % en moyenne d’ici 2027, soit un niveau nettement inférieur à sa moyenne de long terme, en raison de l’atténuation des tensions sur les coûts.

Graphique 10

Perspectives de hausse des composantes énergie et produits alimentaires de l’IPCH

a) Composante énergie de l’IPCH

(variations annuelles en pourcentage)

b) Composante produits alimentaires de l’IPCH

(variations annuelles en pourcentage)

Note : La ligne verticale indique le début de l’horizon de projection.

Tableau 5

Évolution des prix et des coûts pour la zone euro

(variations annuelles en pourcentage, révisions en points de pourcentage)

 

Mars 2025

Révisions par rapport à décembre 2024

2024

2025

2026

2027

2024

2025

2026

2027

IPCH

2,4

2,3

1,9

2,0

0,0

0,2

0,0

-0,1

IPCH hors énergie

2,9

2,4

2,2

2,0

0,0

-0,1

0,2

0,0

IPCH hors énergie et produits alimentaires

2,8

2,2

2,0

1,9

-0,1

-0,1

0,1

0,0

IPCH hors énergie, prod. alim. et fiscalité indirecte

2,8

2,2

2,0

1,9

0,0

-0,1

0,1

0,0

Composante énergie de l’IPCH

-2,2

1,5

0,1

2,3

0,1

2,6

-0,4

-0,5

Composante produits alimentaires de l’IPCH

2,9

2,8

2,6

2,2

-0,1

-0,2

0,2

0,0

Déflateur du PIB

2,9

2,5

2,0

2,0

0,0

0,1

-0,1

-0,1

Déflateur des importations

-0,7

2,4

1,7

1,5

-0,1

0,8

-0,1

-0,2

Rémunération par tête

4,6

3,4

2,8

2,6

0,0

0,1

-0,1

-0,2

Productivité par travailleur

-0,1

0,4

0,8

0,9

0,0

-0,4

-0,1

0,1

Coûts unitaires de main-d’œuvre

4,7

3,0

2,0

1,7

0,0

0,4

0,0

-0,3

Bénéfices unitaires¹⁾

-1,7

1,2

1,9

2,5

-0,8

-0,8

-0,1

0,1

Notes : Les révisions sont calculées sur la base de chiffres arrondis. Les chiffres des déflateurs du PIB et des importations, des coûts unitaires de main-d’œuvre, de rémunération par tête et de productivité du travail sont basés sur des données corrigées des variations saisonnières et des jours ouvrés. Les données rétrospectives peuvent différer des dernières publications d’Eurostat en raison de dates de publication postérieures à la date d’arrêté des projections. Les données (y compris trimestrielles) peuvent être téléchargées à partir de la Macroeconomic Projection Database (base de données sur les projections macroéconomiques) du site Internet de la BCE.
1) Les bénéfices par unité produite sont définis comme l’excédent brut d’exploitation et le revenu mixte (ajusté du revenu des travailleurs indépendants) par unité de PIB en volume.

L’inflation mesurée par l’IPCHX devrait revenir de 2,8 % en 2024 à 1,9 % en 2027, principalement en raison d’une atténuation modérée de la hausse des prix des services (graphique 9), alors que les effets des chocs de grande ampleur passés continuent de se résorber. L’inflation mesurée par l’IPCHX est relativement stable depuis début 2024 mais devrait se modérer à partir du premier trimestre 2025 (graphique 11). Le ralentissement de l’IPCHX attendu à partir de 2025 est dû à une atténuation progressive de la hausse des prix des services, à mesure de la dissipation des ajustements décalés aux tendances générales des prix et de la répercussion de l’affaiblissement des tensions sur les coûts de main-d’œuvre. De plus, le processus de ralentissement de l’inflation mesurée par l’IPCHX reflète l’incidence à la baisse persistante de la diminution des effets de modération indirects exercés par les mouvements antérieurs des prix de l’énergie ainsi que la poursuite de la transmission des effets d’atténuation liés au resserrement passé de la politique monétaire.

Graphique 11

Hausse de l’IPCH de la zone euro hors énergie et produits alimentaires

(variations annuelles en pourcentage)

Notes : La ligne verticale indique le début de l’horizon de projection. Les fourchettes de projection donnent une indication du degré d’incertitude et sont construites de manière symétrique. Elles sont calculées à partir d’erreurs de projection antérieures, après correction des valeurs extrêmes. Les intervalles, du plus foncé au plus clair, reflètent différents degrés de probabilité (30 %, 60 % et 90 %) que la hausse effective de l’IPCHX se situe à l’intérieur des fourchettes correspondantes. Pour plus d’informations, cf. l’encadré intitulé « Illustration de l’incertitude entourant les projections » figurant dans les projections macroéconomiques de mars 2023 pour la zone euro établies par les services de la BCE.

Par rapport aux projections de décembre 2024, les perspectives de hausse de l’IPCH total ont été relevées de 0,2 point de pourcentage pour 2025, laissées inchangées pour 2026 et révisées à la baisse de 0,1 point de pourcentage pour 2027 (graphique 12). La révision haussière pour 2025 s’explique essentiellement par l’augmentation des prix de l’énergie, due à des données plus solides que prévu, et par le rehaussement des hypothèses relatives aux prix du pétrole, du gaz et de l’électricité (cf. encadré 1). Elle est en partie contrebalancée par de légères révisions à la baisse de l’inflation mesurée par l’IPCHX et des composantes produits alimentaires, principalement du fait de données récentes. Pour 2026, la progression de l’IPCHX a été légèrement revue à la hausse, de 0,1 point de pourcentage, en raison de l’incidence haussière des modifications apportées aux hypothèses, notamment la dépréciation du taux de change de l’euro, et d’une révision à la hausse des coûts unitaires de main-d’œuvre pour 2025, compensée uniquement partiellement par l’effet négatif des perspectives plus défavorables concernant la demande. Pour 2027, ces deux effets s’équilibrent davantage et ne justifient par conséquent aucune révision, en termes nets, de l’inflation mesurée par l’IPCHX. La progression des prix de l’énergie a été revue légèrement à la baisse pour 2026 et 2027, en lien avec un recul des prix du pétrole et du gaz plus important qu’anticipé dans les projections de décembre. Les ajustements de l’augmentation des prix de l’énergie sont contrebalancés par la révision à la hausse de l’IPCHX pour 2026, mais impliquent une légère modification à la baisse de l’inflation totale pour 2027.

Graphique 12

Révisions des projections d’inflation par rapport aux projections de décembre 2024

(en points de pourcentage)

Note : Les révisions indiquées sont basées sur des données non arrondies.

Avant de fléchir progressivement, la croissance des salaires nominaux devrait rester élevée dans un premier temps, reflétant entre autres le rattrapage des salaires réels par rapport aux niveaux observés avant la poussée inflationniste. L’augmentation de la rémunération par tête serait revenue à 4,3 % au quatrième trimestre 2024 (0,1 point de pourcentage au-dessus du niveau ressortant des projections de décembre). L’atténuation de la hausse des salaires devrait se poursuivre, jusqu’à une progression moyenne de 2,6 % en 2027, contre 3,4 % en 2025 (graphique 13). Cette décélération reflète principalement le ralentissement attendu de la croissance des salaires négociés et la faible incidence de la hausse plus modérée des salaires minimaux, et est en phase avec la perspective d’un retour graduel de la part salariale à sa moyenne de long terme[8]. Les salaires réels auraient retrouvé leurs niveaux de début 2021 au troisième trimestre 2024, comme anticipé dans les projections de décembre 2024. Même si ces évolutions impliquent un allégement des mesures de compensation prises face à l’inflation, les marchés du travail restent tendus, ce qui explique en partie pourquoi la hausse moyenne des salaires sur l’horizon de projection demeure assez élevée dans une perspective de long terme (2,5 % sur la période allant de 1999 à 2024). En comparaison avec les projections de décembre 2024, la progression de la rémunération par tête a été révisée à la hausse de 0,1 point de pourcentage pour 2025, mais à la baisse de 0,1 point de pourcentage pour 2026 et de 0,2 point de pourcentage pour 2027.

Graphique 13

Rémunération par tête

(données annualisées, en points de pourcentage)

Note : La ligne verticale indique le début de l’horizon de projection.

La croissance des coûts unitaires de main-d’œuvre devrait ralentir en 2026 et 2027, en lien notamment avec la moindre hausse des salaires et la plus forte progression de la productivité. Elle se serait établie à 4,1 % au quatrième trimestre 2024 et devrait diminuer à 1,7 % en moyenne d’ici 2027, un niveau conforme à la moyenne de long terme. En comparaison avec les projections de décembre 2024, elle a été révisée à la hausse de 0,4 point de pourcentage pour 2025, principalement en raison d’une augmentation plus lente de la productivité, et à la baisse de 0,3 point de pourcentage pour 2027, essentiellement du fait des révisions à la baisse de la croissance de la rémunération par tête.

Dans l’ensemble, les tensions d’origine interne sur les prix, mesurées par la croissance du déflateur du PIB, devraient continuer de s’atténuer, malgré l’accélération de la croissance des marges bénéficiaires durant la seconde moitié de l’horizon, en phase avec la reprise économique (graphique 14). Le taux de croissance annuel du déflateur du PIB s’est rapidement contracté en 2024 et devrait, selon les estimations, s’être établi à 2,9 % en moyenne sur l’année (comparé à 5,9 % en 2023). Cette décélération s’explique par une diminution de la contribution des coûts de main-d’œuvre et par une contribution négative des bénéfices par unité produite. Toutefois, la croissance du déflateur du PIB devrait décliner plus progressivement à partir de cette année et revenir à 2,0 % en moyenne tant en 2026 qu’en 2027. Avec l’atténuation de la croissance des coûts unitaires de main-d’œuvre et une dynamique des coûts des autres consommations intermédiaires toujours contenue, la progression des bénéfices par unité produite devrait se redresser quelque peu à partir de 2025, notamment grâce à la reprise économique, au renforcement de la croissance de la productivité et au coup de pouce temporaire donné en 2027 par le traitement statistique du SEQE-2[9]. Par rapport aux projections de décembre 2024, la croissance du déflateur du PIB a été légèrement révisée à la baisse pour 2026 et 2027. L'augmentation des bénéfices par unité produite a été revue à la baisse pour 2025 et légèrement à la hausse pour 2026, compensant en grande partie les révisions à la hausse et à la baisse correspondantes de la progression des coûts unitaires de main-d’œuvre.

Graphique 14

Déflateur du PIB et ses composantes

(variations annuelles en pourcentage, contributions en points de pourcentage)

Note : La ligne verticale indique le début de l’horizon de projection.

La hausse des prix à l’importation devrait fortement s’accélérer en 2025 avant de se modérer à nouveau vers la fin de l’horizon de projection. La croissance du déflateur des prix à l’importation devrait passer de -0,7 % en 2024 à 2,4 % en 2025 et revenir à 1,5 % en 2027. Les révisions de l’augmentation des prix à l’importation (notablement à la hausse pour 2025 et modestement à la baisse pour 2026 et 2027) sont en phase avec les évolutions des prix des matières premières énergétiques et la dépréciation de l’euro induite par les hypothèses techniques[10].

6 Analyses de sensibilité

Trajectoires différentes des prix de l’énergie

Les évolutions futures des prix des matières premières énergétiques demeurent incertaines et des trajectoires différentes des cours du pétrole et du gaz auraient une incidence significative sur les perspectives, en particulier en termes d’inflation. Tandis que les projections établies par les services de la BCE sont fondées sur les hypothèses techniques présentées dans l’encadré 1, dans cette analyse de sensibilité, des trajectoires différentes à la baisse et à la hausse sont calculées à partir des 25e et 75e percentiles des densités neutres implicites tirées des options pour les prix du pétrole et du gaz[11]. Les trajectoires différentes pour les prix du pétrole sont symétriques autour de la référence. Les risques à la hausse liés au durcissement des sanctions américaines sur les exportations de pétrole russe ou iranien sont contrebalancés par des risques à la baisse liés aux conflits commerciaux ou aux importantes capacités de production inutilisées de l’OPEP+. En revanche, la distribution des prix du gaz indique des risques à la hausse pesant sur les hypothèses techniques (graphique 15), traduisant probablement des incertitudes du côté de l’offre. Ces incertitudes sont liées aux perturbations sur le marché mondial du gaz naturel liquéfié (GNL), notamment un recul des exportations russes de GNL dû aux sanctions américaines ou de nouveaux retards dans les projets de GNL planifiés, ainsi qu’à des risques sur le marché européen, comme les difficultés à atteindre les objectifs réglementaires de stockage de gaz pour novembre 2025. Des risques à la baisse existent également, en particulier en cas d’avancées significatives dans le règlement du conflit entre la Russie et l’Ukraine. Une hypothèse de prix constants est également intégrée pour les prix du pétrole et du gaz. Dans chaque cas, un indice synthétique des prix de l’énergie (une moyenne pondérée des trajectoires des prix du pétrole et du gaz) est calculé et les effets sont évalués à l’aide de modèles macroéconomiques des services de la BCE et de l’Eurosystème. Les résultats, présentés dans le tableau 6, suggèrent des risques globalement un peu plus forts à la hausse qu’à la baisse pour l’inflation et des risques plus limités pour la croissance du PIB.

Graphique 15

Trajectoires différentes pour les hypothèses relatives aux prix de l’énergie

a) Hypothèse relative aux prix du pétrole

(en dollars par baril)

b) Hypothèse relatives aux prix du gaz

(en euros par MWh)

Sources : Morningstar et calculs de la BCE.
Note : Les densités implicites tirées des options sur les prix du gaz et du pétrole sont extraites des cotations de marché au 6 février 2025 pour les options sur les contrats à terme ICE Brent Crude et Dutch TTF Natural gas, avec des dates d’expiration trimestrielles fixes.

Tableau 6

Trajectoires différentes des prix de l’énergie et incidence sur la croissance du PIB en volume et sur la progression de l’IPCH

Trajectoire 1 : 25e percentile

Trajectoire 2 : 75e percentile

Trajectoire 3 : prix constants

2025

2026

2027

2025

2026

2027

2025

2026

2027

(écarts par rapport aux niveaux de référence, en pourcentage)

Prix du pétrole

-10,7

-16,4

-18,8

10,2

16,3

21,3

3,6

9,8

12,3

Prix du gaz

-16,0

-21,6

-24,6

23,1

28,3

37,0

4,4

30,9

66,4

Indice synthétique des prix de l’énergie

-14,4

-18,0

-21,2

19,2

24,7

29,9

3,9

18,2

31,2

(écarts par rapport aux taux de croissance de référence, en points de pourcentage)

Croissance du PIB en volume

0,0

0,1

0,1

0,0

-0,2

-0,1

0,0

-0,1

-0,1

Progression de l’IPCH

-0,5

-0,6

-0,3

0,6

0,7

0,5

0,2

0,6

0,6

Notes : Un indice synthétique des prix de l’énergie combinant les prix des contrats à terme sur le pétrole et sur le gaz est employé aux fins de cette analyse de sensibilité. Les 25e et 75e percentiles font référence aux densités neutres implicites dans les options sur les prix du pétrole et du gaz au 6 février 2025. L’hypothèse de prix constants pour le pétrole et le gaz considère les valeurs respectives arrêtées à la même date. Les effets macroéconomiques sont déclarés comme les moyennes de plusieurs modèles macroéconomiques établis par les services de la BCE et de l’Eurosystème.

Trajectoires différentes d’évolution du taux de change

Cette analyse de sensibilité évalue les implications, pour les projections de référence, d’autres trajectoires du taux de change, en général synonymes de risques à la baisse pour la croissance et l’inflation. Les hypothèses techniques relatives aux taux de change retenues dans les projections de référence sont maintenues constantes sur l’horizon de projection. D’autres trajectoires à la baisse et à la hausse tirées des 25e et 75e percentiles des densités neutres implicites dans les options sur le taux de change USD/EUR le 6 février 2025 pointent des risques d’appréciation de l'euro par rapport au scénario de référence (graphique 16). Les effets de ces trajectoires différentes sont évalués à l’aide des modèles macroéconomiques des services de la BCE et de l’Eurosystème. L’effet moyen sur la croissance de la production et sur l’inflation est présenté dans le tableau 7 ci-dessous.

Graphique 16

Autres trajectoires du taux de change USD/EUR

Sources : Bloomberg et calculs des services de la BCE.
Notes : Une hausse implique une appréciation de l’euro. Les 25e et 75e percentiles font référence aux densités neutres implicites dans le taux de change USD/EUR au 6 février 2025. Les effets macroéconomiques sont déclarés comme les moyennes de plusieurs modèles macroéconomiques établis par les services de la BCE et de l’Eurosystème.

Tableau 7

Incidence sur la croissance du PIB en volume et sur l’inflation mesurée par l’IPCH d’autres trajectoires du taux de change

Trajectoire 1 : 25e percentile

Trajectoire 2 : 75e percentile

2025

2026

2027

2025

2026

2027

Taux de change EUR/USD

-2,1

-3,1

-3,7

3,3

7,8

11,4

Taux de change USD/EUR (écart en pourcentage par rapport au scénario de référence)

-1,1

-1,6

-1,9

1,7

3,9

5,7

(écarts par rapport aux taux de croissance de référence, en points de pourcentage)

Croissance du PIB en volume

0,0

0,1

0,1

-0,1

-0,2

-0,3

Progression de l’IPCH

0,1

0,1

0,1

-0,1

-0,2

-0,3

Sources : Bloomberg et calculs des services de la BCE.
Notes : Une hausse implique une appréciation de l’euro. Les 25e et 75e percentiles font référence aux densités neutres implicites dans le taux de change USD/EUR au 6 février 2025. Les effets macroéconomiques sont déclarés comme les moyennes de plusieurs modèles macroéconomiques établis par les services de la BCE et de l’Eurosystème.

Encadré 3
Comparaison avec les prévisions des autres institutions et du secteur privé

Les projections de mars 2025 établies par les services de la BCE s’inscrivent globalement à l’intérieur de la fourchette des autres prévisions relatives à la croissance du PIB et à la hausse de l’IPCH. La projection de croissance se situe au bas de la fourchette des prévisions provenant d’autres institutions et des enquêtes réalisées par les prévisionnistes du secteur privé pour l’ensemble de l’horizon. S’agissant de la progression de l’IPCH pour 2025, la projection des services de la BCE est supérieure de 0,2 point de pourcentage aux autres prévisions, probablement en raison de différences dans les hypothèses relatives aux prix de l’énergie. En ce qui concerne la hausse de l’IPCH pour 2026 et 2027 et celle de l’IPCHX sur l’ensemble de l’horizon, les projections des services de la BCE se situent dans la fourchette étroite des autres prévisions.

Tableau

Comparaison des prévisions récentes relatives à la croissance du PIB en volume, à la hausse de l’IPCH et à l’augmentation de l’IPCH hors énergie et produits alimentaires dans la zone euro

(variations annuelles en pourcentage)

 

Date de publication

Croissance du PIB en volume

Progression de l’IPCH

Progression de l’IPCH hors énergie et produits alimentaires

2024

2025

2026

2027

2024

2025

2026

2027

2024

2025

2026

2027

Projections des services de la BCE

Mars 2025

0,8

0,9

1,2

1,3

2,4

2,3

1,9

2,0

2,8

2,2

2,0

1,9

Consensus économique

Février 2025

0,8

0,9

1,2

1,4

2,4

2,1

1,9

2,0

2,8

2,2

1,9

-

Enquête de la BCE auprès des prévisionnistes professionnels (EPP)

Janvier 2025

0,7

1,0

1,3

-

2,4

2,1

1,9

-

2,8

2,2

2,0

2,0

Fonds monétaire international

Janvier 2025

0,8

1,0

1,4

1,3

2,3

2,1

2,0

2,0

-

-

-

-

OCDE

Décembre 2024

0,8

1,3

1,5

-

2,4

2,1

2,0

-

2,9

2,4

2,0

-

Commission européenne

Novembre 2024

0,8

1,3

1,6

-

2,4

2,1

1,9

-

2,9

2,4

2,0

-

Sources : Consensus économique, 13 février 2025 pour 2024 et 2025 (les données relatives à 2026 et 2027 proviennent de l’enquête de janvier 2025) ; enquête menée par la BCE auprès des prévisionnistes professionnels, 31 janvier 2025 ; perspectives de l’économie mondiale du FMI, 17 janvier 2025 ; perspectives économiques de l’OCDE, 4 décembre 2024 ; prévisions économiques de la Commission européenne, automne 2024, 15 novembre 2024.
Notes : Ces prévisions ne sont pas directement comparables entre elles ou avec les projections macroéconomiques des services de la BCE, dans la mesure où elles ont été finalisées à des dates distinctes. En outre, elles s’appuient sur des méthodes différentes pour le calcul des hypothèses relatives aux variables budgétaires, financières et externes, y compris les prix du pétrole, du gaz et des autres matières premières. Les projections macroéconomiques des services de la BCE indiquent des taux de croissance annuels du PIB en volume corrigés du nombre de jours ouvrés, alors que la Commission européenne et le Fonds monétaire international annoncent des taux de croissance annuels non corrigés. Les autres prévisions ne précisent pas sur quelle base elles sont fondées en la matière.

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HTML ISBN 978-92-899-7200-0, ISSN 2529-4482, doi: 10.2866/2679567, QB-01-25-095-FR-Q


  1. La date d’arrêté des hypothèses techniques et des projections relatives à l’économie mondiale est le 6 février 2025. Les projections macroéconomiques pour la zone euro ont été finalisées le 19 février.

  2. Sauf mention contraire, dans cette section, les références aux agrégats mondiaux et/ou internationaux d’indicateurs économiques excluent la zone euro.

  3. Les données publiées après la finalisation des projections montrent que les divergences sectorielles se sont maintenues en février, l’indice des directeurs d’achat relatif à la production manufacturière indiquant toujours une contraction, malgré une amélioration au cours du mois. Cette évolution a été contrebalancée par une nouvelle modération de l’indice des directeurs d’achat pour les services, l’indice composite des directeurs d’achat pour la production restant inchangé à 50,2 en février.

  4. L’orientation budgétaire de la zone euro est définie comme la variation du solde primaire corrigé du cycle, également ajusté pour tenir compte des subventions NGEU du côté des recettes. Alors que l’orientation budgétaire constitue une mesure descendante de l’orientation de la politique de finances publiques, les mesures discrétionnaires sont évaluées à l’aide d’une approche ascendante. Ces mesures rendent compte des modifications des taux d’imposition, des aides budgétaires et autres dépenses publiques adoptées ou susceptibles d’être adoptées par les parlements nationaux des pays de la zone euro.

  5. La poursuite du retrait des mesures résiduelles de soutien face aux prix de l’énergie constitue une autre source de durcissement en 2025. L’assouplissement des facteurs non discrétionnaires est dû à des pertes de recettes et d’autres résidus d’impôts, tandis que les effets de composition, qui ont été fortement positifs en 2024, devraient être neutres tant en 2025 que sur le reste de l’horizon.

  6. Les subventions NGEU (sans incidence macroéconomique sur le volet recettes du budget) sont estimées à 0,4 % du PIB pour 2026 et à (un niveau proche de) zéro pour 2027.

  7. Cf. l’encadré intitulé « Évaluation des effets sur la croissance et l’inflation des politiques de transition en matière de changement climatique » dans les projections de décembre 2024 établies par les services de l’Eurosystème.

  8. La croissance du salaire minimum devrait revenir à 3,3 % en 2025, contre 4,2 % en 2024. Sa contribution mécanique directe à la croissance globale des salaires s’élèvera à environ 0,1 point de pourcentage en 2025.

  9. Le système SEQE-2 devrait être pris en compte dans les comptes nationaux en tant que taxe de production lors de la délivrance des permis d’émission, à savoir l’année suivant la mise aux enchères. Les recettes au titre du SEQE-2 pour 2027 ne seront donc comptabilisées dans les comptes nationaux qu’en 2028, alors que les prix finaux devraient déjà augmenter en 2027. L’excédent brut d’exploitation devrait donc être temporairement majoré en 2027.

  10. La projection relative aux prix à l’importation dans la zone euro suppose des politiques de l’UE inchangées en matière de droits de douane. Cf. l’encadré 2 pour plus de détails.

  11. Les prix de marché utilisés sont ceux qui prévalaient le 6 février 2025 (date d’arrêté des hypothèses techniques).

Annexes
6 March 2025